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avant d’avoir pu faire venir d’Europe les machines pour l’extraction et le lavage du minerai. On ne s’expliquerait pas l’indifférence des Espagnols pas plus que celle des chercheurs d’or pour les richesses minières des Philippines, si l’on ne savait que les terrains aurifères sont au pouvoir des sauvages. Si M. Oudan de Verly a su se faire accepter par eux, c’est parce qu’il avait appris leur langage et avait vécu à leur manière.

Le fer et l’aimant se trouvent partout ; mais, a l’exception de quelques fourneaux d’une lente production, on n’en tire aucun profit important. Le cuivre n’a été découvert qu’à Mancayan ; une société de capitalistes fait exploiter la mine, fondre le minerai sur place, mais sans en tirer autre chose, jusqu’à présent, que des pertes. Le soufre est tout aussi abondant dans les volcans éteints ou en activité qu’il peut l’être à Naples. A Taal, les parois d’un petit cratère, au fond duquel je me suis fait descendre, sont tapissées d’une épaisse couche de soufre : des fumerolles blanches s’élèvent sans cesse de son centre, et on dirait que le volcan n’est qu’un monceau de ce minéral en lente ignition.


III

Le gouvernement supérieur des Philippines se compose d’un gouverneur général, d’un directeur d’administration civile et d’un directeur des finances. Le premier, pris dans les plus hauts grades de l’armée espagnole, est chargé de la surveillance politique des fonctionnaires ; il a le pouvoir exécutif, le droit de grâce et la direction des relations internationales ; il a aussi sous son commandement immédiat les employés civils et la haute main sur les mutations des alcades et autres magistrats. Le second est à la direction des contributions municipales et provinciales ; le troisième n’est qu’une sorte de payeur et de receveur des finances de l’état.

Chaque province des Philippines, y compris celle des îles Mariannes, a son gouverneur ou son alcade chargé de l’administration intérieure de la région qu’il commande ; il y rend la justice au civil comme au criminel. Ces fonctionnaires, presque toujours relevés de leurs charges lorsqu’il y a un changement de ministère à Madrid, sont Espagnols péninsulaires et avocats. Le recouvrement des impôts est confié par les alcades et d’office aux plus riches Indiens ou métis des provinces ; ces receveurs indigènes prennent alors le titre de cabezas de barengays ; ils sont responsables des rentrées, et l’on peut aisément se figurer combien ce mode de perception est ruineux et vexatoire pour un grand nombre de notables. Beaucoup refusent ces onéreuses fonctions, mais leur mauvaise volonté est très mal vue en haut lieu ; si les récalcitrans ont un jour besoin de justice