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supérieure, et la docilité aveugle avec laquelle elles lui obéissaient ! Combien de fois n’avons-nous pas présenté au lecteur des systèmes variés sur une représentation libérale des contribuables, en demandant par exemple aux grandes corporations commerciales, industrielles, scientifiques, judiciaires, etc., la désignation du conseil municipal. Nous déclinions l’élection directe par le nombre, nous refusions à la puissance brutale et désintéressée de la multitude le choix délicat et difficile des représentants d’intérêts locaux et tout particuliers, nous lui refusions l’aptitude à remplir des devoirs qui exigent une compétence spéciale ; nous disions qu’avec un tel système on devait craindre les entraînemens, les prodigalités, les violences et le désordre. Dès que l’élection du conseil municipal de Paris fut, comme partout ailleurs, confiée au suffrage universel, les noms sortis de l’urne populaire semblèrent justifier tout d’abord ces appréhensions, et certes on ne nous a pas accusé d’hostilité systématique et préconçue pour avoir fait alors ressortir le peu de notoriété et de compétence, le caractère passionné des élus. Qu’est-il arrivé cependant ? À part quelques démonstrations coupables assurément, mais vaines, comme les vœux d’amnistie, les prétentions à l’affranchissement de toute tutelle administrative, après des injonctions peu sérieuses adressées aux préfets et même aux ministres, et sauf les votes éminemment regrettables d’une allocation aux familles des condamnés des conseils de guerre, et les suppressions budgétaires dans les subsides du clergé et des œuvres de charité religieuse, si l’on compare les budgets actuels avec les budgets précédons, on n’y trouvera aucune modification essentielle : l’économie est restée la même, les services publics n’ont pas été modifiés, les ressources suffisantes sont appliquées aux nécessités qui ne varient point. Serait-ce, comme on le dit souvent qu’après, tant de secousses intérieures, alors que toutes les forces gouvernementales ont été détruites ou diminuées, quand les barrières construites par les mœurs, les traditions et l’organisation des classes contre les tendances au désordre qui gisent au fond de toutes les sociétés ont été enlevées, le mécanisme administratif créé par le premier empire, subsistant à tous les expédiens politiques successivement employés, suffit encore par sa fermeté et l’agencement logique de tous ses rouages, comme les cadres des vieux régimens pour les jeunes recrues, à maintenir la discipline sociale et assurer le bon fonctionnement des. organes de la vie publique ? Il y a du vrai dans cette explication et l’on peut bien dire que de toutes nos constitutions celle de l’an vin est encore la plus vivace et reste la base la plus solide de notre organisation sociale. Certes, si l’on veut soustraire la meilleure partie de la nation à la pire tyrannie,