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l’or est vendu aux banques au prix de 3 livres 10 shillings ou Il livres l’once, ce qui, au dire de M. Trollope, est moins que le prix de revient de tout l’or tiré d’Australie, qui, tous comptes d’extraction, de lavage, de broyage de quartz faits, se trouve monter à 5 livres l’once. Dans un district aurifère, près de Rockampton (Queensland), une population de 1,896 mineurs avait, pour l’année 1870, produit 31,017 onces l’or qui avaient réalisé 112,234 livres, ce qui donnait pour chaque mineur un bénéfice de 75 livres, assez ordinaire rémunération, comme on le voit. Aussi n’avons-nous aucune peine à croire avec M. Trollope qu’en définitive la classe de mineurs qui gagne le plus, et surtout le plus sûrement, est encore celle des ouvriers qui travaillent à gages sans poursuivre la fortune pour eux-mêmes.

A Ballaarat, le salaire d’un mineur est de 40 à 48 shillings par semaine, à Gympie (Queensland), à Gullgong (Nouvelle-Galles du sud), à Sandhurst (Victoria), il est de 2 livres 10 sh. à 3 livres. Qu’il ait ramené ou non de l’or pendant la semaine, le mineur est toujours sûr de ses 3 livres, ce qui est plus que-ne gagnent souvent ceux qui l’emploient lorsqu’on s’est engagé sur de faux indices. Si le cœur lui en dit d’ailleurs, toute spéculation ne lui est pas fermée. Un bon tiers en effet de ces nombreuses compagnies sont ce qu’on appelle des tribute-companies, associations en sous-ordre qui afferment à une compagnie principale une portion de terrain promettant une veine, à la condition qu’une certaine proportion de l’or trouvé appartiendra à la compagnie. Ces associations se composent de plusieurs mineurs qui s’engagent sans capital dans l’entreprise au moyen de l’ingénieuse combinaison que voici : une moitié travaille sur le terrain loué, tandis que l’autre moitié travaille à gages et fournit par ses salaires aux dépenses de l’association entière, en sorte que le travail sérieusement lucratif des uns sert à attendre pour tous l’heureuse issue du travail aléatoire des autres. Si la spéculation tourne bien, ces hommes peuvent s’enrichir en peu de temps; si elle tourne mal, et c’est le cas le plus fréquent, ils restent Gros-Jeans comme devant, sans avoir rien gagné ni rien perdu.

Le travail des mines a donné naissance à diverses professions, dont quelques-unes passablement originales; de ce nombre est le métier de « berger » de terrain affermé. Lorsqu’un mineur a pris les titres voulus sur un terrain de son choix, il est obligé par la loi de l’occuper, et, s’il n’y peut travailler immédiatement, d’y faire acte de présence au moins deux heures par jour ou de s’y faire représenter par un tenant lieu. Ce métier de tenant lieu s’appelle shepherding, et rapporte pour un travail peu fatigant et durant deux heures de la journée, prises généralement dans la matinée, la somme assez rondelette de 25 shillings par semaine. Il semblerait