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LA PROPRIETE
PENDANT LA REVOLUTION FRANCAISE

La révolution de 1789 a été, à n’en pas douter, une révolution sociale : a-t-elle été aussi une révolution socialiste ? Pour résoudre cette question, il faudrait s’entendre sur le sens du mot socialisme, et il faut avouer que, s’il est facile de réfuter le socialisme, il n’est pas aussi facile de le définir. On désigne généralement par là une doctrine qui porte atteinte au principe de la propriété individuelle. Cependant toute modification au régime de la propriété doit-elle par là même être appelée une mesure socialiste ? Nul doute qu’à toutes les époques de l’histoire on n’ait plus ou moins modifié le régime de la propriété ; les diverses lois successorales dans les différens pays en sont une preuve suffisante : toutes ces modifications seront-elles à la charge ou à l’honneur du socialisme ? Bien loin de le compromettre par là, on lui donnerait au contraire une généalogie et une tradition dont il n’a pas besoin. Il faut donc restreindre le socialisme, si on ne veut pas tout confondre, à la conception d’un ordre nouveau et purement chimérique de distribution des richesses, qui les mettrait à portée de tous par l’autorité de la loi. Sans nous perdre dans des définitions abstraites, si difficiles à délimiter avec précision, contentons-nous, pour ce qui concerne la révolution, d’avancer les deux propositions suivantes, qui suffisent à l’absoudre de toute compromission avec les idées socialistes modernes : la première, c’est que dans ses réformes la révolution s’est appuyée sur un principe généralement admis jusqu’alors par tous les gouvernemens, tous les publicistes, tous les jurisconsultes, à savoir, le droit de régler là propriété par la loi. En second lieu, la conséquence de ces réformes a été un établissement plus