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plus singulière des ressorts de la politique suffisent pour attester qu’on est porteur de l’étincelle divine. Jamais nous n’avons mieux compris le dévoûment des missionnaires qu’en lisant ce que les voyageurs nous rapportent des Maoris, car il y a gloire véritablement à faire entrer dans la vaste humanité quelqu’un de ces héroïques sauvages, et nous concevons qu’on puisse être tenté par cette œuvre, même au risque d’être mangé.

Les hostilités eurent leur origine dans les difficultés relatives aux terres achetées. Le gouverneur Hobson avait réduit les 45 millions d’acres de terres que les colons prétendaient avoir acquis à 282,000, restituant le reste aux indigènes comme ayant été indûment acheté. Les Maoris saisirent très vite ce désir de justice du gouvernement anglais, et surent se servir avec intelligence des moyens qu’il leur offrait pour résister aux envahisseurs. Le gouvernement leur apprenait qu’il y avait des achats légitimes et d’autres qui ne l’étaient pas ; ils cherchèrent donc des raisons qui pussent invalider la majeure partie des transactions, et ils en trouvèrent parfois qui auraient fait honneur à la sagacité d’un jurisconsulte émérite. Sous le gouverneur Fitzroy, successeur d’Hobson, les indigènes de Taranaki, dans l’île du nord, prétendirent que 60,000 acres de terre occupés par les colons sur leur territoire, dans l’établissement dit de New-Plymouth, n’avaient pas été légalement achetés. Enquête faite, il fut d’abord reconnu que les terres ayant été conquises et vendues par le conquérant même, un chef du nom de Te Whero-Whero, plus tard célèbre sous le nom de Potatau comme premier roi de la Nouvelle-Zélande, le marché était valable de par la loi maorie, qui admet le transfert absolu de la propriété au conquérant. Cela est vrai, répondirent les indigènes de Taranaki, mais ce qui n’est pas moins la loi maorie, c’est que la conquête est insuffisante pour ce transfert si elle n’est pas suivie d’une occupation réelle ; or ces terres ont été conquises, mais n’ont jamais été occupées, elles n’ont donc pas été vendues légitimement. Le fait était exact, et le gouverneur Fitzroy réduisit ces 60,000 acres à 3,500, ruinant ainsi la presque totalité des colons qui en cette circonstance pouvaient dire qu’ils s’étaient établis sur ces terres en toute bonne foi. Lorsque les Maoris eurent partie gagnée, ils commencèrent à prendre en mépris le gouvernement qui cédait ainsi à leurs réclamations, appelèrent faiblesse ce qui n’était que prudence et crurent qu’ils pouvaient avec impunité remplacer la subtilité par la violence. Des agens de l’administration coloniale ayant été envoyés dans la région qui est aujourd’hui la province de Marlborough pour lever le plan de la vallée de Wairau, près de la petite ville actuelle de Picton, vallée que les selliers prétendaient avoir été acquise par la New Zealand land company, deux, chefs maoris, Rangihaeta et