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L’universalité de la noblesse, tant chez les Vizcayens que chez les Guipuzcoans, suppose que tous avaient l’obligation d’accourir à la défense du territoire comme aux expéditions entreprises par leur seigneur. En effet, par suite de la situation politique au moyen âge, la noblesse ayant pour base le métier des armes, on ne comprend pas plus de noblesse sans soldats que de soldats sans noblesse. Aussi le fuero de Vizcaye marque-t-il expressément jusqu’à quel point les Vizcayens, répondant à l’appel de leur seigneur, sont tenus de le suivre sans solde : ce point est l’arbre Malato, à Luyando, qui faisait autrefois la limite extrême de la province. De même le fuero de Guipuzcoa constate qu’à l’égard des hidalgos, naturels et habitans de la province, l’usage toujours observé fut « que le monarque leur donnait une solde pour tout le temps qu’ils devaient servir volontairement hors de leur pays sur l’ordre de la province et à la demande de sa majesté. » Voilà pour les guerres ordinaires ; mais en cas d’invasion ou de péril extrême tous les hommes valides, père et fils, padre por hijo, sans condition de solde, sont convoqués ; en 1706 parut un décret de la junte du Guipuzcoa ordonnant que tous les hommes de seize à soixante ans se tiendraient prêts à marcher, et que chaque famille aurait dans sa maison des armes à feu. En Alava également, si le fuero ne dit rien du service militaire, l’usage et la tradition sont entièrement conformes à ce qui se pratique dans les deux autres provinces. Il n’est donc pas vrai, comme on le croit généralement, que les Basques se prétendent exempts du service militaire ; jamais ils ne se sont refusés et ne pouvaient se refuser, d’après le fuero, à l’appel du seigneur ; mais il est admis aussi, et la coutume précieusement conservée a pris chez eux force de loi, que le seigneur ne les appelle que dans les besoins pressans du pays, et l’on ne trouverait pas au cours de leur histoire l’exemple d’une seule levée non motivée et arbitraire. Chose non moins curieuse et qui montre bien la confiance que les souverains avaient en ces montagnards, les Guipuzcoans conservaient le droit de nommer le colonel qui commandait leur contingent, ainsi que les commissaires chargés de régler les étapes et de fournir au logement des troupes royales passant par leur territoire ; en Alava, ces attributions revenaient au député général, qui était en même temps le chef de toutes les forces militaires de la province.

Quant au service sur mer, volontaire de la part des Guipuzcoans jusqu’au temps des Rois Catholiques, il devient alors obligatoire. On trouve cette obligation consignée d’une manière expresse dans le recueil de 1482, et il ne parait pas que la province ait jamais protesté contre la faculté reconnue au roi de destiner les marins du Guipuzcoa au service de la flotte ; tout au plus ose-t-elle intervenir pour que les levées se fassent avec le moins de préjudice et de rigueur