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cuire les macaronis. L’enfant tardant à venir, la mère mangea presque tout : il ne resta plus au fond du chaudron qu’un fil de pâte qu’elle saupoudra de fromage et qu’elle noya dans du bouillon ; mais Micco ne voulut pas de cette pitance. La mère dit alors : « Bâton, bats Micco, parce qu’il ne veut pas manger les macaronis. » Le bâton n’eut pas l’air d’entendre. La mère dit alors : « Feu, brûle le bâton, parce que le bâton ne veut pas battre Micco, et Micco ne veut pas manger les macaronis. » Le feu n’eut pas l’air d’entendre. La mère dit alors : « Eau, éteins le feu, parce que le feu ne veut pas brûler le bâton, le bâton ne veut pas battre Micco, et Micco ne veut pas manger les macaronis. » Mais l’eau n’eut pas l’air d’entendre. La mère dit alors : « Bœuf, bois l’eau, parce que l’eau ne veut pas éteindre le feu, le feu ne veut pas brûler le bâton, le bâton ne veut pas battre Micco, et Micco ne veut pas manger les macaronis. » Mais le bœuf n’eut pas l’air d’entendre. La mère dit alors : « Corde, attache le bœuf, parce que le bœuf ne veut pas boire l’eau, l’eau ne veut pas éteindre le feu, le feu ne veut pas brûler le bâton, le bâton ne veut pas battre Micco, et Micco ne veut pas manger les macaronis. » Mais la corde n’eut pas l’air d’entendre. La mère dit alors : « Souris, ronge la corde, parce que la corde ne veut pas attacher le bœuf, le bœuf ne veut pas boire l’eau, l’eau ne veut pas éteindre le feu, le feu ne veut pas brûler le bâton, le bâton ne veut pas battre Micco, et Micco ne veut pas manger les macaronis. » Mais la souris n’eut pas l’air d’entendre. La mère dit alors : « Chat, croque la souris, parce que la souris ne veut pas ronger la corde, la corde ne veut pas attacher le bœuf, le bœuf ne veut pas boire l’eau, l’eau ne veut pas éteindre le feu, le feu ne veut pas brûler le bâton, le bâton ne veut pas battre Micco, et Micco ne veut pas manger les macaronis, » Et comme ça le chat croqua la souris, la souris rongea la corde, la corde attacha le bœuf, le bœuf but l’eau, l’eau éteignit le feu, le feu brûla le bâton, le bâton battit Micco, et Micco mangea les macaronis. »

Un humaniste allemand du XVIe siècle, Bebel ou Bebelius, qui fut professeur à Tubingue et maître de Mélanchthon, ne dédaigna pas d’écrire en latin l’historiette que voici : Deux frères partirent un beau matin pour aller cueillir des poires sur un chêne ; l’un monta sur l’arbre et en secouait les branches, l’autre demeura au pied du chêne et devait ramasser les fruits qui tomberaient. Il ne tomba rien, car les chênes ne portent pas de poires. Cependant celui qui était en bas dit à l’autre : « C’est toi qui les manges toutes, et tu ne m’en laisses point. — Nullement, répondit celui qui secouait les branches : c’est moi qui ai toute la peine, et c’est toi qui croques tous les fruits. » De là une discussion qui tourna en dispute, et des coups de langue on en vint aux coups de poing. « Mais je n’ai