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phocène orque ou vulgairement l’épaulard. Au XVIe siècle, grâce à l’Arioste, alors très connu en France, cet habitant de la mer devint fantastique et terrible, d’où ces deux vers de Du Belley :


Je vis sortir des abysmes
Une orque pour m’abysmer.


Mais revenons à nos contes d’ogres ; le premier est celui de Viola. Nous traduisons littéralement la version recueillie à Pomigliano :

« Il y avait une fois trois filles, et la plus jeune se nommait Viola. Toutes les trois travaillaient, mais la première filait, la seconde tissait et la troisième cousait. Le fils du roi en devint amoureux (de la troisième), et toutes les fois qu’il passait, il disait : « Qu’elle est belle, celle qui file, qu’elle est plus belle, celle qui tisse, mais qu’elle est plus belle encore, celle qui coud. Elle me coud le cœur. Vive Viola ! vive Viola ! » Les sœurs en avaient de l’envie et, par dépit, elles la mirent à filer. Passa le fils du roi, et il dit : « Qu’elle est belle, celle qui tisse, qu’elle est plus belle, celle qui coud, mais qu’elle est plus belle encore, celle qui file ! Elle m’a filé le cœur ! vive Viola ! vive Viola ! » Les sœurs la mirent à tisser, mais le fils du roi n’en dit pas moins son refrain, et il revenait toujours à Viola. « Qu’elle est belle, celle qui coud, qu’elle est plus belle, celle qui file, mais qu’elle est plus belle encore, celle qui tisse ! Elle m’a tissé le cœur ! vive Viola ! vive Viola ! » Un jour, Viola étant à coudre sur le balcon, son dé tomba dans le jardin de l’ogre. Alors voilà qu’elle va le dire à ses sœurs. Ses sœurs, qui ne pouvaient la voir (la souffrir), lui répondirent de ne pas s’en fâcher parce qu’elles l’attacheraient à une corde et la descendraient dans le jardin, et qu’après elles la feraient remonter. Viola les crut, mais ses sœurs ne firent pas comme ça. Quand elles l’eurent fait descendre, elles cassèrent la corde et s’en allèrent. La pauvre Viola, se trouvant là, ne savait pas elle-même ce qu’elle avait à faire. Elle pensa qu’elle ferait bien en se mettant sous la chaise de l’ogre. Un moment après, l’ogre s’assit, et, pendant qu’il était assis, il fit un bruit. Alors voilà que Viola sort de là-dessous et dit : « Papa, Dieu vous bénisse ! » L’ogre se retourna et dit : « Oh ! malheur ! avec un bruit, j’ai fait une fille ! » Il la mena en haut et la garda auprès de lui. Un jour Viola était en train de se laver la figure : parut le perroquet du roi, parce que le roi logeait en face de l’ogre. Le perroquet dit à Viola : « Fi, fi ! la fille de l’ogre se lave la figure ! » Elle rentra tout en colère. L’ogre lui demanda la raison du pourquoi elle était ainsi. Elle le dit, et l’ogre lui souffla qu’une autre fois que le perroquet dirait ça elle aurait à répondre :