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LE
QUATRIEME CENTENAIRE
DE L'UNIVERSITE D'UPSAL

Ils sont heureux entre tous, les peuples qui savent allier dans une juste mesure quelque respect de la tradition à l’ardeur éclairée du progrès. Pendant que de puissans empires sont livrés aux folies sanglantes de la guerre, qui ont de fatales surprises et accablent même les vainqueurs, pendant que de grandes nations souffrent de la division intérieure, ils déploient en silence une activité féconde ; sans agitations vaines, sans brusques changemens, ils se transforment à leur grand profit et au profit des autres. Pour qui n’a pas visité le nord depuis une vingtaine d’années, le progrès accompli par la Suède offre avec la précédente période un de ces contrastes qui surprennent et instruisent. Ce progrès éclate à première vue. Les difficultés du voyage étaient réelles autrefois ; rien que pour arriver de Copenhague à Stockholm, il fallait naviguer trois jours et trois nuits, heureux s’il ne s’ajoutait pas à cela, dans une mer comme la Baltique, une tempête de quinze à vingt heures qui forçât à chercher un port. On trouvait dans la capitale de la Suède un seul véritable hôtel, qui, s’appelant « l’Hôtel garni » par excellence, contenait trois ou quatre appartemens ; les restaurans de la ville n’ouvraient plus après certaines heures du milieu du jour. On gagnait en pittoresque, il est vrai, ce qui manquait en confortable. Pour le service de la poste aux lettres, un facteur au costume antique, armé d’une cloche, coiffé d’un haut casque, parcourait bruyamment les rues principales, s’arrêtait aux carrefours, et recevait des deux mains les correspondances déposées au hasard sur les comptoirs des boutiques. Le sommeil était troublé la nuit par le bruit exorbitant des trompes que faisaient retentir du haut des clochers les gardiens contre les incendies trop fréquens, ou par le