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précédens permet d’appeler anatomo-physiologiques, 3° les phénomènes psychologiques. Convenons ici, pour donner nous-même à notre langage plus de clarté et de précision, de désigner chacun de ces ordres de faits par un mot unique ; nous appellerons le premier l’organe, le second la fonction, le troisième l’esprit. A l’aide de ces termes simples, la méthode que nous voulons définir se formulera sans peine :

L’organe et l’esprit, voilà les bases ; quiconque aborde l’étude dont nous parlons devra être préalablement anatomiste et psychologue. La première chose cherchée, la première inconnue, c’est la fonction. Pour la découvrir, la connaissance de l’organe suffit ; mais, pour aller plus loin, il faut de plus connaître l’esprit. Aller plus loin, c’est chercher la corrélation que l’on suppose exister entre l’organe, la fonction et l’esprit, ou, plus exactement, entre l’organe et la fonction d’une part, la fonction et l’esprit d’autre part. Entre l’organe et la fonction, cette corrélation résulte de la nature même de la fonction, qui est un phénomène anatomo-physiologiques la fonction, c’est l’organe, plus quelque chose ; si on a la fonction, on a le rapport entre l’organe et la fonction, puisque la fonction, par définition, contient et suppose l’organe.

Mais le rapport entre la fonction et l’esprit est une seconde inconnue. Ce rapport ne sera jamais un rapport d’analogie ; ce sera un rapport de correspondance, de simultanéité ; l’esprit et la fonction sont, si l’on veut, les deux faces d’un même fait, ses deux traductions en deux langues différentes, la langue intérieure, inétendue, la langue extérieure, étendue ; quel mot d’un des deux langages correspond à tel mot de l’autre ? voilà le second problème.

Nous avons donc deux bases d’études et deux problèmes : deux bases, l’organe et l’esprit, le cerveau et l’âme, l’anatomie et la psychologie ; deux problèmes : la fonction, l’acte du cerveau, voilà le premier ; le second est le rapport entre la fonction cérébrale et l’esprit, entre, l’activité physiologique du cerveau et l’activité psychologique. La solution du premier problème sera la physiologie du cerveau, la solution du second sera la psycho-physiologie. Sans ces distinctions, sans cette méthode, la recherche marche au hasard, les bases en sont mal assurées, les conclusions rappellent les élucubrations de l’alchimie du moyen âge. La physiologie cérébrale ne méritera et n’obtiendra le respect des psychologues que lorsqu’elle se sera soumise à cette discipline, lorsqu’elle aura courbé le iront sous l’autorité de la logique, cette puissance impersonnelle qui a sur la science entière le même droit absolu que la loi morale sur les actions humaines.


VICTOR EGGER.