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CORRESPONDANCE

LE DRUIDISME. — L’ARMÉE GAULOISE A LA BATAILLE D’ALESIA.

A M. ALBERT RÊVILLE


Monsieur,

L’intéressant travail que vous avez publié dans la Revue des Deux Mondes[1], sous le titre de Vercingétorix et la Gaule au temps de la conquête romaine, est une de ces œuvres de vulgarisation qu’on ne saurait trop encourager. L’histoire, présentée sous une forme concise, élégante, dégagée de l’appareil de citations qui encombre les œuvres d’érudition, et rendue ainsi plus accessible aux gens du monde, contribue puissamment à l’éducation nationale en faisant pénétrer partout la connaissance, malheureusement encore bien incomplète, des origines et de la vie des peuples, et en particulier des Gaulois nos aïeux. Mais il est à peine besoin d’ajouter que les productions de ce genre ne seraient pas sans inconvéniens si leurs auteurs s’écartaient trop des véritables données de la science. C’est pourquoi je pense remplir un devoir en vous signalant ici trois points de votre travail, qui me semblent exiger des rectifications ; ce sont les suivans :

1° Le mode et la date d’établissement du druidisme en Gaule ; 2° la liste des peuplades gauloises qui eurent à fournir des contingens de guerriers pour l’armée de secours destinée à dégager Vercingétorix enfermé dans Alesia, et le chiffre de chacun de ces contingens ; 3° la comparaison de ces contingens entre eux, et la signification des différences qui les séparent, au point de vue de la politique des partis qui divisaient la nation gauloise.

Après avoir rappelé que, d’après certains auteurs, les druides seraient entrés en Gaule six ou sept siècles avant l’ère chrétienne avec la puissante immigration qui vint alors d’Asie à travers l’Europe centrale, vous regardez comme beaucoup plus probable que le druidisme est un produit autochthone, antérieur aux invasions mentionnées par les historiens ; qu’il est en quelque sorte le fruit du génie gaulois, du genius loci ; il se serait formé au sein des populations les plus anciennement fixées sur notre sol, probablement au sein de ces forêts du pays chartrain où se tenaient les assises annuelles de la Gaule[2].

  1. N° des 15 août et 1er septembre 1877.
  2. Revue du 15 août 1877, p. 845-847.