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institution gauloise au sens complet du mot, et dans une phase encore trop embryonnaire pour qu’il y ait quelque chose d’étonnant dans le fait que les bandes émigrantes ne le transportèrent pas avec elles dans leur nouvelle patrie.

Telles sont, monsieur, les réflexions que me suggère votre première critique. J’ajouterai seulement que c’est surtout l’étude des religions comparées qui m’a fait pencher vers l’admission de l’origine indigène du druidisme. Je ne suis pas du reste tout à fait isolé. M. Henri Martin, qui, dans la troisième édition de son Histoire de France, considérait encore le druidisme comme importé en Gaule, incline dans la quatrième (I, p. 65) à ne plus voir en lui qu’une réforme ou un développement de l’ancienne religion gauloise. Le fait est que tout ce qu’on rapporte des croyances et des superstitions qu’il propageait parait tenir à notre sol, à notre flore, à nos forêts. Là où l’arbre pousse, quand on ne peut montrer qu’on l’y a transplanté tout poussé, il est plus simple de penser qu’il y a été semé par la nature, et je crois qu’on peut en dire autant de tous les sacerdoces qui ont marqué dans l’histoire. Ce fut toujours une illusion, souvent favorisée par eux-mêmes, de s’imaginer qu’ils venaient de très loin.

Je me suis bien longuement étendu sur ce point, qui, je vous l’avouerai, pique fortement ma curiosité. Je tâcherai d’être plus bref en traitant les deux derniers.

Il est possible de les réunir en un seul. Vous relevez des inexactitudes, contraires au texte scientifiquement révisé, dans la liste que j’ai dressée des cantons gaulois invités à former l’armée de secours qui devait délivrer l’armée bloquée dans Alise, et des contingens auxquels chacun d’eux fut taxé ; puis, vous en concluez que j’ai eu tort de ranger avec M. Mounier cette répartition parmi les indices tendant à prouver que la faction éduenne la régla conformément à ses ambitions secrètes et à son ardent désir de prépondérance.

L’édition sur laquelle j’ai travaillé est celle de Tauchnitz, 1867. Elle a rétabli quelques-unes des leçons rejetées par les savans recenseurs dont vous citez les éditions, entre autres la mention des Helves, non des Helvètes, et le chiffre de 6,000 comme celui du contingent de l’Armorique entière. J’aurais dû, je le reconnais franchement, soumettre à une critique plus soigneuse ce texte, qui s’est prêté plus facilement que d’autres aux erreurs des copistes, et par conséquent aux variantes. J’ai rangé à tort les Lémovikes parmi les cantons à 8,000 hommes. Je ne fais non plus aucune difficulté de reconnaître que les 30,000 hommes exigés des Rauraques et des Boïens doivent être reportés plus vraisemblablement sur les confédérés armoricains, quand même on pourrait se demander pourquoi le chiffre de ce contingent se trouve cette fois