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c’est à ce corps qu’est dévolu le pouvoir législatif. C’est au conseil de l’empire de discuter et de rédiger les lois, à lui d’examiner le budget, à lui de recevoir les comptes-rendus des ministres. Les plus graves questions lui sont soumises; il est composé des plus hauts dignitaires ou fonctionnaires de l’état, mais en toute chose il n’a que voix consultative. Comme le conseil du roi de l’ancienne monarchie française, cette assemblée n’est en somme qu’une réunion de simples donneurs d’avis. L’empereur, qui en nomme les membres et en fixe les attributions, ne lui délègue point ses pouvoirs; c’est toujours l’empereur qui décide, alors même que le conseil semble prononcer. L’autocrate n’est nullement lié par les avis de cette assemblée; il les confirme, il les rejette, il les modifie à son gré. L’étude même des lois nouvelles, qui semblerait une des fonctions les plus naturelles du conseil de l’empire, est souvent confiée à des commissions spéciales. Ces grands corps de l’état ne sont, tout comme les simples fonctionnaires, que les agens du pouvoir autocratique[1].

Il en est de même des ministres, entre lesquels se partagent les soins de l’administration. L’érection des ministères est à peu près contemporaine de la fondation du conseil de l’empire ; c’est encore là une création de l’empereur Alexandre Ier qui, ambitionnant le rôle de réformateur, cherchait à donner à la Russie des institutions plus en rapport avec celles des grands états européens. C’est par un oukaze de 1802 que ces ministères remplacèrent les collèges de Pierre le Grand, qui au fond n’étaient guère que les anciens prikazes moscovites remaniés sur le modèle des administrations collégiales en honneur en Occident au temps de la Régence[2]. Les dix ministères aujourd’hui existant n’embrassent pas toutes les branches de l’administration, il y a en dehors quelques services indépendans, comme le contrôle de l’empire, dont les chefs ont les fonctions et le rang de ministre. L’empereur a de plus sa chancellerie particulière divisée en quatre sections, dont la troisième est une sorte de ministère de la haute police. Les chefs des départemens ministériels ont d’ordinaire pour collaborateur une sorte d’adjoint ou de sous-secrétaire d’état (tovarichtch). Les différens départemens

  1. Le conseil de l’empire est divisé en trois départemens, comptant chacun sept ou huit membres. Il y a en outre des membres ne siégeant qu’au plenum. Ces derniers sont au nombre d’une quarantaine, non compris les ministres, qui sont membres de droit.
  2. Les ministères, dont le nombre a plusieurs fois varié, sont aujourd’hui au nombre de 10 : 1° la cour ou maison de l’empereur, 2° les affaires étrangères, 3° l’intérieur, 4° les voies de communication, 5° les finances, 6° les domaines, 7° la justice, 8° l’instruction publique, 9° la guerre, 10° la marine.