Page:Revue des Deux Mondes - 1878 - tome 27.djvu/656

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

budget d’entretien annuel des routes nationales s’élève à 30 millions de francs, que celui des routes départementales n’est guère moindre, celui des simples chemins vicinaux quatre ou cinq fois plus considérable, on conviendra que la question est des plus graves au point de vue économique, qu’une méthode qui permettrait de réduire la dépense, ne fût-ce que de dix ou même de cinq pour cent, mérite d’être étudiée avec attention. En réalité, l’économie due aux procédés rationnels d’entretien actuellement en usage est plus élevée encore ; même, on peut affirmer que la méthode de Trésaguet, — il est à propos de lui restituer le nom de l’ingénieur qui l’inventa, — est seule capable de donner aux chaussées l’uni, la résistance dont le roulage, chariots ou voitures légères, a besoin en toutes saisons. Il est nécessaire que la couche supérieure d’une route empierrée soit résistante afin que les roues ne s’y enfoncent point, même par les temps de pluie, et qu’elle soit unie, pour que les voitures n’éprouvent ni cahots ni ballottement. Sur une chaussée neuve ou fraîchement rechargée, ces deux conditions se réalisent en y faisant passer plusieurs fois le lourd rouleau compresseur que tout le monde connaît. Les cailloux se tassent, se broient ; les détritus formés par les écrasemens se logent dans les interstices. La surface entière devient plane et régulière. Le même résultat s’obtiendrait dans un délai plus long par le seul effet du roulage, mais au détriment des chevaux et des voitures, qui s’y fatigueraient beaucoup, et avec un certain gaspillage de matériaux.

Cette chaussée se détériorera peu par l’effet du roulage, pourvu qu’elle ait une épaisseur suffisante : si elle est peu fréquentée, parce qu’elle supportera peu de fatigue ; si elle l’est beaucoup, parce que les voitures s’entre-croiseront en tous sens et produiront une usure uniforme sur toute la largeur. Mais les intempéries des saisons risquent d’y causer de graves dégâts. Les hâles de l’été dessèchent et réduisent en poussière cette sorte de mortier naturel qui réunit les cailloux les uns aux autres ; que l’un d’eux se déplace, il en résulte une cavité, une roue s’y accroche, ébranle les cailloux voisins, un trou se forme et s’agrandit petit à petit. L’hiver, c’est encore pis ; la pluie délaie ce qu’il y a de moins dur et le transforme en boue ; l’eau s’infiltre dans le sol, elle s’y gèle, et, lorsque le dégel survient, toutes les parties qu’elle a atteintes se soulèvent. Il y a moyen cependant de remédier à ces inconvéniens. Le cantonnier fait au plus vite les réparations les plus urgentes en sorte que le mal ne puisse s’aggraver. Toutefois le plus important est d’employer pour la construction d’abord, pour l’entretien ensuite, les meilleurs matériaux. Les pierres calcaires sont plus ou moins gélives, l’hiver les transforme en boue ; par compensation, elles conservent en été une humidité suffisante ; les pierres siliceuses résistent bien à la