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On devait payer en or, dit M. David A. Wells, qui vient de publier un travail sur la question, « parce que l’honnêteté est la loi suprême du pays, et que la déloyauté ne peut pas être tolérée. » On était pénétré aussi des difficultés de toute nature qui allaient surgir pour les États-Unis dans les rapports avec le dehors; les principaux états de l’Europe sont en train de se rallier à l’étalon d’or. Comment ferait-on pour les échanges quand on n’aurait pas le métal de tout le monde? Le nouveau président des États-Unis, M. Hayes, avait été frappé de ces difficultés et avait déclaré qu’il mettrait son vélo à l’exécution du bill, s’il était adopté. Mais rien ne put triompher de la coalition des intérêts, et le Bland-bill, après une discussion très animée, passa dans les deux chambres à la majorité des trois quarts des voix. Le veto du président s’est trouvé ainsi paralysé, car, au terme de la constitution, il ne peut avoir d’effet que contre un bill qui n’a pas réuni les deux tiers des suffrages. Le bill Bland est donc devenu la loi des États-Unis, et, après avoir subi devant le sénat un léger amendement tendant à limiter la fabrication de l’argent, il est ainsi conçu : « Il sera frappé des dollars d’argent du poids de 412 grains 1/2, au titre de 900 millièmes, lesquels dollars seront monnaie légale pour toutes les dettes publiques et privées; il ne peut en être frappé par mois pour moins de 2 millions de dollars et pour plus de 4. Cette limitation ne sera pas désagréable aux propriétaires des mines d’argent, car elle empêche l’afflux du métal sur le marché et en maintient le prix. Avec une moyenne de 3 millions de dollars par mois à faire frapper, ils ont un débouché suffisant pour leur exploitation. Aussi est-ce, dit-on, sinon sur leurs instances, du moins avec leur assentiment que la limitation a été introduite.


I.

Avant d’en arriver à la discussion du Bland-bill, qui avait été ajournée au moment de l’élection du dernier président, le parlement américain avait nommé une commission dite silver-commission afin d’étudier la question et de faire une enquête : l’enquête a eu lieu, et sait-on à quelle conclusion on est arrivé dans cette commission? Le rapport qui a été déposé en son nom par le sénateur Jones, du Nevada, c’est-à-dire de la contrée où existent particulièrement les mines d’argent, non-seulement s’est prononcé pour la remonétisation de l’argent, mais pour la fabrication d’un papier-monnaie inconvertible. « L’inconvénient de la monnaie métallique, dit-il, est qu’on est exposé à la voir disparaître par l’exportation. Un tel danger n’est pas à craindre, si l’on a seulement du papier.