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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




31 mai 1878.

Nous assistons curieusement, un peu tristement, à un spectacle qui n’est peut-être pas nouveau et qui n’est pas moins instructif. Évidemment, la république réunit aujourd’hui toutes les conditions qui font un régime régulier. Elle est née d’une certaine force des choses, de la nécessité, de la division même de ses adversaires, qui ne peuvent nouer contre elle que des coalitions momentanées et stériles. Elle a été votée par une assemblée souveraine qui, pour épargner à la France les périls d’un provisoire indéfini, a eu la prudence de se soumettre à ce qu’elle ne pouvait empêcher. Elle a été organisée par une constitution aussi définitive que toutes les constitutions; Elle a été sanctionnée par le pays dans des élections successives qui ont envoyé au parlement une majorité favorable aux institutions nouvelles. Si elle a passé par des crises qui auraient pu être mortelles, elle en est sortie intacte; elle a échappé à ses ennemis, elle est désormais sous la garde, sous la direction d’un ministère sensé, honorable, dont on ne conteste ni la fidélité ni les intentions libérales, ni la modération conservatrice, qui, en un mot, est une garantie pour toutes les opinions sincères.

Que faut-il de plus? La république existe, elle est à peine contestée par des adversaires de plus en plus impuissans, elle a pour elle la loi, la majorité du parlement, tous les moyens de vivre. La paix est dans les pouvoirs publics comme elle est assurément dans les désirs, dans les besoins du pays, — et cependant il y a partout des apparences de lutte dans une situation qui semble sans fixité. On dirait que nous jouissons tout au plus d’une trêve à échéance prochaine. Ceux-là mêmes qui devraient se préoccuper le plus d’acclimater un régime qu’ils ont appelé de leurs vœux sont les premiers à laisser éclater leurs impatiences. On ne peut se contenir, et, comme s’il n’y avait pas assez de problèmes sérieux faits pour intéresser le pays, finances, chemins de fer, réformes de l’enseignement, organisation militaire, on se plaît à