Page:Revue des Deux Mondes - 1878 - tome 28.djvu/566

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

distribution des groupes, ni dans l’attitude des personnages, qui sont à peine indiqués. Lorsqu’on y regarde de près, on s’aperçoit même que le travail est assez inachevé et n’a d’autre intérêt que celui de la difficulté vaincue. Nous passons également insensibles devant un bloc de jade attaqué d’un ciseau hésitant par un ouvrier qui craint d’entamer trop profondément la précieuse matière qu’il façonne.

La céramique chinoise à l’exposition n’offre rien que chacun ne connaisse. Il est difficile de discuter le mérite de ses œuvres, trop fantaisistes pour ne pas relever exclusivement du caprice de chacun. Celui-ci goûtera la bizarrerie des contours, l’éclat des couleurs, la monotonie classique des sujets, celui-là en déclarera insipide la laideur compassée. Ce qu’on peut constater dans les vases exposés comme dans ceux que nos marchands importent, c’est la décadence de la fabrication. La loi du bon marché opère déjà dans l’extrême Orient la révolution qu’elle a produite dans le reste du globe. La nécessité de faire vite et à peu de frais entraîne une négligence trop visible. Regardez ce grain rude, ces bariolages délavés, ces tons faux, ce vernis épais, et comparez les nouvelles porcelaines avec le vieux-chine ! Quelques vases monochromes ou flambés réjouissent encore l’œil des amateurs par la finesse de leurs teintes vert-céladon, bleu-lapis ou serpentine ; mais qu’ils sont loin des beaux échantillons anciens venus jusqu’à nous ! Les Chinois sont gens de routine et de procédé plus que d’imagination ; aussi n’ont-ils pas de rivaux dans les industries qui ne demandent qu’une stricte fidélité aux recettes traditionnelles. C’est ainsi que leurs cloisonnés à fond bleu de ciel restent inimitables, par la netteté du dessin, l’habile mariage des tons et la transparence de l’émail. Le nombre en est grand ; et, si tous ne sont pas d’un égal fini, leurs belles couleurs nettes et brillantes attirent l’œil sans le lasser.

Les tissus de soie tiennent une place importante dans les envois de la Chine. Mais ici encore les exposans ont dépassé le but, par un excès de zèle intempestif. Ils ont essayé de se mettre au goût de l’Europe et de placer sous ses yeux des échantillons à son usage. Au lieu de vêtemens et de tentures indigènes, ils ont déployé des châles et des pièces de taffetas qui semblent s’offrir à nos élégantes. On eût volontiers toléré ou même admiré des couleurs criardes sur les robes des dames imaginaires que la plupart d’entre nous se représentent l’éventail en main, adossées à un paravent ; mais ces châles de crêpe que nous avons vus sur les épaules de nos grand’mères, mais ces soieries unies dont l’aunage européen indique que nos femmes et nos sœurs sont invitées à s’y tailler une toilette de bal, nos yeux sont blessés de les voir empourprés d’un rouge violent, trempés dans un bain vert-cru, nacarat, lie de vin, ou revêtus de