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mascarades, où il se trouvoit ordinairement habillé en femme, ouvroit son pourpoint et découvroit sa gorge, y portoit un collier de perles et trois collets de toile, deux à fraise et un renversé, ainsi que lors les portoient les dames de la cour. » À quelle contrée, à quelle basse décadence faut-il rapporter ces fêtes célébrées à huis clos par la luxure ? Dans un festin, des femmes vêtues en habits d’homme faisaient le service ; dans un autre, « furent employées à faire le service les plus belles et honnêtes de la cour, étant à moitié nues et ayant leurs cheveux épars. » — Les fêtes majestueuses et animées de Louis XIV ne craignent pas la lumière du jour ou des flambeaux. Le grand roi donne quelques carrousels inspirés non plus par la chevalerie, mais par les romans de chevalerie, ce qui est fort différent. La masse admire ces pompes plus encore qu’elle ne s’y mêle, si populaire qu’ait été le monarque pendant les premières années de son long règne ; lorsqu’il aura cessé de l’être, elles formeront contre son règne même de la part de la même masse irritée un grief de plus.


III

Si splendides qu’aient été ces fêtes du passé, elles présentent aussi des côtés qui doivent être censurés. Il en est qui tiennent à la grossièreté et à la corruption des temps. Il n’y a eu guère de société plus blasée, plus sceptique, plus corrompue que celle du XVe siècle. Ces débordemens et cette facilité aux crimes allaient être pourtant encore dépassés au XVIe. Non pas certes non plus qu’en cette fin du XIVe siècle et durant le XVe les fortes vertus ne fassent défaut, ni les élans d’une vraie piété. Tous les sentimens, toutes manières de vivre existent simultanément dans une grande société. Il est toujours aisé d’opposer des démentis aux jugemens trop absolus. Il est difficile pourtant d’exagérer le manque de sens moral, les goûts de luxe et de débauche, la légèreté frivole et vénale d’une trop grande partie de cette noblesse brave, il est vrai, mais sans patriotisme trop souvent, et toujours prête à la sédition, à la trahison envers son prince. Elle fit battre par ses défauts la France par les Anglais. Les fêtes publiques de ces temps valent mieux sous certains rapports que ces temps eux-mêmes. Ce n’est pas une raison pour taire les désordres qui devaient donner par momens à certaines rues un aspect de kermesses. Que dire surtout de ces indécences autorisées qui faisaient partie du programme ? On en rencontre dans presque toutes ces célébrations. Elles n’étaient pas pour déplaire à Louis XI, prince graveleux et libertin malgré toutes ses dévotions et avec ses mœurs si facilement cruelles. Parcimonieux en tout le reste,