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Pour ne parler que des expositions forestières, quel profit peut-on tirer des collections de bois brut ou poli, de formes variées plus ou moins artistement groupées, que les diverses nations exposent à nos regards? Une exposition forestière n’a d’intérêt qu’au point de vue commercial ou au point de vue scientifique. Dans le premier cas, il faut qu’elle soit accompagnée de documens statistiques qui fassent connaître les prix, les qualités et la quantité disponible des bois mis en montre. Dans le second, il est nécessaire que des catalogues détaillés donnent non-seulement les noms botaniques, mais aussi les conditions dans lesquelles les arbres qui ont produit ces bois ont végété. Sauf la France, dont l’exposition à la fois scientifique et commerciale est admirable, aucune nation ne nous a fourni ces renseignemens et ne nous a mis à même de nous faire une idée quelque peu précise des richesses forestières qu’elle possède. Il eût été intéressant cependant de profiter de cette occasion pour faire l’inventaire de la production ligneuse dans le monde et pour se rendre compte de la distribution des forêts sur le globe. C’est cette étude que nous allons essayer d’entreprendre. A défaut de documens officiels, nous aurons pour nous guider dans ce travail le beau rapport sur la géographie forestière que M. Barbié du Bocage a lu au congrès des agriculteurs, et le savant ouvrage sur la Végétation du globe que M. Grisebach, professeur à Gœttingue, vient de livrer à la publicité[1].


I.

Les deux grands réservoirs dans lesquels les arbres, comme tous les autres végétaux, puisent les élémens dont ils sont formés sont l’air et le sol. Le premier fournit le carbone qui, provenant de la décomposition de l’acide carbonique, est absorbé par les plantes dans la proportion de 2,000 kilogrammes environ par hectare ; il cède également une partie de l’azote qu’il tient en suspension et qui, entraîné par les pluies, est absorbé par les racines. Quant au sol, il fournit les matières minérales qui constituent les cendres, et l’eau qui, soit à l’état hygrométrique, soit à l’état de composition, entre dans le tissu ligneux. Le sol manifeste son action sur la végétation forestière beaucoup plus par ses propriétés physiques que par ses propriétés chimiques; c’est par l’hygroscopicité, la pénétrabilité, la profondeur, qu’il devient favorable ou contraire à la croissance de telle ou telle essence d’arbres, bien plus que par les élémens

  1. La Végétation du Globe, d’après sa disposition suivant les climats, par M. Grisebach, traduit de l’allemand par M. Tchihatchef, 2 vol in-8o. Germer Baillière, 1878.