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Il y a une de ces affaires qui est encore devant la chambre, qui a été engagée dans un moment de passion, par mesure de représaille, et qui est certainement aujourd’hui un embarras : c’est cette enquête ordonnée et commencée au lendemain du 14 octobre 1877 sur les élections, sur la période ouverte le 16 mai, sur les actes de l’administration, de tous les fonctionnaires qui se sont plus ou moins associés à cette lamentable campagne de réaction. Des délégués de la chambre se sont transportés solennellement dans les provinces, ils ont interrogé des témoins, fait comparaître des gardes champêtres, fouillé les archives des préfectures, recueilli des dépêches télégraphiques et des documens de toute sorte pour instruire le procès de la candidature officielle. Voilà bien un an qu’on travaille à cette terrible instruction ; on a fait des rapports particuliers, on prépare un rapport général. Les voyages d’information ne sont même pas finis, les délibérations ne discontinuent pas, et récemment encore on publiait les bulletins des travaux de la commission dont l’œuvre éclatera sans doute un jour ou l’autre. Elle sera foudroyante, cette œuvre accusatrice de la commission d’enquête, c’est bien possible. Assurément le 16 mai n’a rien négligé pour exciter de trop justes ressentimens et pour donner des armes contre lui. Franchement cependant, à quoi tout cela peut-il servir ? quel profit peut-on trouver à prolonger cette instruction rétrospective et à raviver tardivement ces vieilles querelles ? Est-ce que le 16 mai n’a pas été jugé et condamné souverainement ? Si c’est une victoire politique qu’on poursuit, elle ne peut certes être plus complète. Plus de soixante élections de candidats officiels ont été annulées, et il y en a encore un certain nombre qui vont sans doute provoquer une fois de plus des débats passionnés, qui seront annulées probablement comme les autres. De tout ce qui rappelle cette triste et dangereuse période de six mois il ne reste plus rien. Ministère, préfets, sous-préfets, agens plus ou moins compromis, tout a disparu ; l’administration a été entièrement renouvelée. La vraie et sérieuse victoire de cette époque, c’est d’avoir triomphé de tout sans sortir de la loi, en puisant au contraire une force dans la loi, c’est d’avoir traversé une crise redoutable sans que la constitution ait été ébranlée, d’avoir assuré à la république elle-même cet avantage de devoir une sécurité de plus aux efforts impuissans des hostilités coalisées contre elle. C’est là vraiment la plus désirable et la plus utile victoire. Que veut-on de plus ? Est-ce qu’on pourrait sérieusement songer à un procès lorsqu’une année est déjà écoulée, lorsque la situation a été si complètement renouvelée ? — On veut du moins, dit-on, se donner la satisfaction de répondre par une enquête à toutes les enquêtes qui ont été faites sur le 4 septembre, sur la défense nationale. Eh bien, soit ! on a réussi. Les délégués ont eu le temps de parcourir les départemens, ils ont eu l’avantage de paraître dans l’éclat de leur autorité. L’en-