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une foule de lois postérieures ont tantôt restreint, tantôt élargi les applications, profite aux enfans aussi bien qu’aux autres classes d’indigens, sans qu’il soit besoin d’une législation spéciale fixant, comme le fait notre loi de 1869, les catégories d’enfans qui retombent à la charge de l’assistance publique. Mais, comme les formes de la misère de l’enfance sont les mêmes dans tous les pays, nous allons, à peu de chose près, nous trouver en présence de ces mêmes catégories d’enfans dont nous avons déjà en France étudié la condition, et cette similitude donne quelque intérêt à la comparaison du nombre des enfans secourus dans les deux pays. En France, le nombre des enfans secourus, y compris les secours temporaires accordés aux enfans des filles mères, s’élevait à une date récente à 124,896 pour une population de trente-huit millions d’habitans, chiffre dans lequel les pupilles de l’assistance publique figurent jusqu’à vingt ans. En Angleterre[1], ce chiffre s’élevait en 1876 à 242,348 pour une population de vingt-quatre millions d’habitans, et dans ce chiffre ne figure aucun enfant âgé de plus de seize ans. Cet écart entre les deux pays donne, au point de vue de l’état relatif du paupérisme, une indication intéressante. Le nombre des enfans secourus a du reste diminué en Angleterre depuis vingt-cinq ans ; en 1851, il était de 310,642.

Tous ces enfans ne reçoivent pas des secours de la même manière. Les uns, et c’est le plus grand nombre (195,888), reçoivent l’assistance au dehors (out-door relief), tout en demeurant avec leurs parens ou ceux qui prennent soin d’eux; les autres, au nombre de 46,460, reçoivent au contraire l’assistance au dedans (in-door relief), c’est-à-dire qu’ils sont élevés aux frais de la charité publique dans des établissemens dont je parlerai tout à l’heure. Ce sont d’abord les enfans qui tombent momentanément à la charge de la paroisse parce que leurs parens sont eux-mêmes, pour un temps plus ou moins long, entrés au workhouse. On les appelle dans la pratique casual children, parce que les frais de leur entretien sont accidentellement supportés par la paroisse, sans qu’ils soient définitivement adoptés par elle. Ils correspondent à cette catégorie d’enfans qui, à Paris, est maintenue provisoirement au dépôt de la rue d’Enfer, sans être immatriculée au nombre des pupilles de l’assistance publique. Viennent ensuite les orphelins (orphans), qui, en Angleterre comme en France, forment un contingent considérable et parmi lesquels figurent quelquefois des enfans de femmes veuves ou abandonnées par leurs maris, que la

  1. A moins d’indication contraire, les documens statistiques dont il sera fait usage dans cette étude ne concerneront jamais que l’Angleterre et le pays de Galles, l’Ecosse et l’Irlande ayant chacune leur législation et leur statistique à part.