Page:Revue des Deux Mondes - 1878 - tome 30.djvu/269

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

et il est impossible qu’avec un personnel plus restreint l’éducation ne soit pas plus soignée. Ce qui rend plus remarquable encore ce grand développement des établissemens consacrés aux jeunes détenus, c’est que ce sont tous des établissemens fondés par la charité privée. L’état leur paie à la vérité, par tête d’enfant, une somme qui était autrefois de 5 shillings par semaine et qui a été récemment abaissée à 2 shillings. Mais cette allocation forme à peine la moitié de leurs ressources; le reste leur arrive sous forme de souscriptions permanentes que leur assurent de hauts patronages, de legs, d’allocations des autorités paroissiales, ce qui montre bien que l’œuvre des écoles de réforme et des écoles industrielles est en Angleterre une œuvre nationale à laquelle chacun apporte son obole. C’est peut-être cet intérêt qui fait aujourd’hui un peu défaut chez nous, et qui, s’il se réveillait, permettrait d’accomplir bien des réformes, sans même avoir recours à l’intervention du législateur.

Les écoles de réforme et les écoles industrielles diffèrent assez sensiblement par la nature de la population qu’elles reçoivent, et à un œil un peu exercé cette différence se lit au premier regard sur les physionomies. Ce n’est que dans les écoles de réforme qu’on rencontre ces enfans à la physionomie sournoise et concentrée où le vice a déjà imprimé sa flétrissure, et que dans nos colonies de jeunes détenus on voit avec inquiétude mélangés avec des enfans dont l’aspect n’est pas sensiblement différent de celui des élèves d’une école primaire. Mais dans l’aspect extérieur rien ne distingue l’école de réforme de l’école industrielle. Aux unes et aux autres, on s’efforce de conserver l’apparence d’une grande école publique, voire même d’une habitation particulière. Il y a dans une rue de Londres, voisine d’Hyde-Park, telle école industrielle qu’aucun signe extérieur, sauf une petite plaque en cuivre fixée sur la porte, ne distingue de l’uniformité monotone des maisons environnantes et l’une des écoles de réforme pour les jeunes filles qui donne les meilleurs résultats est située à Hampstead, dans une villa à la porte de laquelle j’ai hésité quelque temps à sonner craignant de commettre une erreur qui serait prise en mauvaise part. Il n’y a point non plus de différence sensible entre les procédés d’éducation des écoles de réforme et ceux des écoles industrielles. Dans les unes comme dans les autres, on donne aux enfans, soit une éducation industrielle proprement dite, soit une éducation agricole. L’école prend alors souvent le nom de farm. Il y a trois écoles de réforme, et quatre écoles industrielles qui sont des vaisseaux-écoles pour la marine. Mais ici se retrouve la différence entre les deux natures d’établissemens, les élèves des écoles industrielles