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la honte et du déshonneur : «République française; administration du département de la Seine. Le citoyen Rossel, colonel du génie, est nommé par le comité central commandant supérieur du XVIIe arrondissement (Batignolles). Pour le comité central : L. CHALAIN, secrétaire général du ministre des finances. En l’absence des membres du comité en séance; vu l’urgence, nomination provisoire à ratifier par le comité central : G. ARNOLD, DUPONT, CASTIONI[1]. »

Le comité central avait paré aux difficultés financières et aux nécessités du mouvement agressif que l’on allait entreprendre contre l’armée française ; ce n’était pas assez : il voulut, avant de se séparer, faire un acte réparateur qui serait à la fois son cadeau d’adieu et le don de joyeux avènement de la commune ; dans sa séance du 28 mars, sous la présidence du citoyen général Bergeret, il décrète la suppression des agens de police, du service de la sûreté et du service des mœurs. Pour mieux inaugurer le nouveau règne, on lâchait le vol et la prostitution, qui en furent le plus sérieux ornement. Ce fut Assi qui prononça le discours de clôture; il eut, comme l’on dit, le mot de la fin : « La république est à jamais fondée et la sécurité publique n’est plus exposée à aucun péril. D’ailleurs à tout être, quel qu’il soit, qui voudrait attaquer la république, on ne doit qu’un coup de fusil. » C’est probablement en vertu de cette maxime que l’on ne dut qu’un coup de fusil à Mgr Darboy, au président Bonjean, à Chaudey et à tant d’autres.


II. — LE HUIS CLOS DES SÉANCES.

« La solennité » de la proclamation des votes fut très bruyante. Je l’ai vue. On cria, on chanta, on agita des drapeaux rouges. Tout cela avait l’air forcé. On eût dit que les acteurs de cette bouffonnerie, qui si promptement allait devenir sinistre, ne croyaient pas à la réalité de leur rôle. Les fédérés, qui hurlaient leur Marseillaise avinée, titubaient comme le pouvoir qu’ils acclamaient. En résumé deux cohues se rencontrèrent; l’une composée de soldats débraillés qui défila; l’autre composée des membres du comité central et de la commune tout chamarrés d’écharpes rouges, qui regarda défiler. Paris ne s’aperçut guère de ce changement de gouvernement; aux inconnus du comité central succédaient les inconnus de la commune. Ces hommes ont été lestement crayonnés par un écrivain

  1. La nomination fut ratifiée par la commune. «2 avril 1871 ; le citoyen Rossel reste chef militaire de la 17e légion. Le citoyen Géroudier représente dans ladite légion la pouvoir civil comme membre de la commune. Les délégués de la commission exécutive : G. LEFRANCAIS; Félix PYAT; E. VAILLANT. »