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de ces masques de poètes et d’acteurs hardiment fouillés. Drapés dans des manteaux qui ont un air de décor, ils sont en scène, ils semblent venir à la rampe pour une ovation. J.-J. Caffieri, Houdon, ont créé là un type de sculpture d’un à-propos merveilleux. Pour une certaine manière de traiter la tête humaine, il y a toute une école au Théâtre-Français comme il y en a une à Versailles pour les rois, pour les politiques et les hommes de guerre. C’est l’esprit et c’est la chair d’un autre temps. Comment se fait-il après cela que tant de sculpteurs veuillent ignorer que le buste est une forme créée par l’art et que ce n’est pas un fragment produit par le hasard ; qu’il obéit à des lois et que, suivant qu’il finit aux épaules, à la poitrine, ou qu’il va jusqu’aux bras, suivant qu’il prend la forme d’une gaîne ou qu’il se termine par un contour arrondi, il comporte plus ou moins de vie, il est plus propre à rendre soit le caractère, soit l’expression ! Malgré ces règles, le champ reste vaste et la part suffisante faite à la liberté. On nous accuserait de pédantisme, si, prenant occasion de ce qu’un certain nombre de bas-reliefs se trouvent au Salon, nous disions que le bas-relief est aussi une forme de l’art qui obéit à des lois définies. C’est en effet une théorie complète. Mais il nous suffira de signaler comme méritant l’attention la charmante étude de jeune fille assise de M. Roty, dont les plans sont d’une douceur extrême ; la Vie heureuse par M. Peter, qui est d’une bonne entente et d’un goût suave. Citons encore comme représentant des extrêmes, d’une part M. Gros, rude mais puissant, et d’autre part M. Levillain, qui fait penser à Flaxman, et après cela laissons au visiteur, s’il le veut, le soin de dégager les principes.

Qu’il s’agisse de statues ou de bustes, c’est au travail du marbre que nos artistes se livrent avec le plus de prédilection. Assez longtemps la pratique en a langui. Le ciseau était un peu froid, un peu timide, un peu lourd dans les ouvrages qui n’étaient signés ni de David, ni de Pradier. Depuis trente ans environ, il est devenu plus hardi, et à partir de l’exposition universelle de 1867, il s’est de plus en plus affranchi. Alors on fut justement émerveillé de l’habileté de M. Vela et de ses compatriotes. Sans aller aux excès, on s’en appropria quelque chose, et notre technique a pris un vif essor sous l’influence italienne. Aussi voyons-nous maintenant bon nombre de sculpteurs qui ne s’en remettent qu’à eux d’achever leur marbre et qui s’acquittent de cette partie de leur travail avec une dextérité, un amour, une aisance dont M. Chapu et M. Schœnewerk donnent cette année, ainsi que plusieurs de leurs confrères, l’exemple frappant.

Nous sommes moins heureux lorsqu’il s’agit du bronze ; non que