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IV

Dans l’examen auquel nous venons de nous livrer, nous avons cherché à ne rien négliger de ce qui pouvait servir à constater au Salon la situation et les tendances présentes de l’école française. Nous l’avons fait en spectateur bien plus qu’en juge. Nous avons visité l’exposition dans les mêmes conditions que le public, et, pas à pas, nous l’avons appréciée avec nos impressions et nos idées acquises. Maintenant il faut changer de point de vue : il faut embrasser l’ensemble pour nous résumer et pour conclure. Jusqu’ici, dans nos appréciations, la part a-t-elle été faite trop grande à quelque optimisme ? Nous n’avons pas à nous en défendre. Pourquoi se vouer tout d’abord à la sévérité ? Chercher le bien dans les choses quand elles se présentent à nous, ce n’est pas d’une bienveillance aveugle, c’est chercher notre propre bien, c’est surtout céder à ce premier mouvement de sympathie que l’on doit éprouver en présence de toute manifestation du travail.

En commençant la revue du Salon par l’architecture, nous avons obéi à la logique. On ne peut s’expliquer comment, en général, on s’interdit le droit de s’intéresser à cet art qui fait tant pour nous. C’est une idée reçue que ses tracés sont mystérieux, arides, que ses procédés sont intelligibles pour les initiés seulement. Cette dernière prétention ne peut être admise dans un temps comme le nôtre où les constructions sortent de terre en si grand nombre et où il est peu de personnes qui n’aient eu, pour le moins, l’idée de bâtir. Nous avons essayé de montrer qu’à côté de leur mérite pratique les dessins des architectes avaient une valeur artistique. Peut-être n’avons-nous pas suffisamment appuyé sur le genre spécial d’intérêt et de beauté qu’offre le dessin géométral. Justement sa sincérité mathématique répond d’une manière victorieuse à ceux qui se refusent l’intelligence de l’architecture : ils font voir l’ensemble et les détails des édifices dans leur développement intégral, exempts des déformations de la perspective. En même temps leur perfection graphique, appliquée aux plus beaux monumens et relevée par un coloris idéal, est bien de nature à parler au sentiment. Que reste-t-il à objecter quand à cette vérité d’un caractère scientifique on ajoute le contrôle optique d’une vue perspective ? N’a-t-on pas à la fois, dans deux images, la réalité de la forme et la réalité de l’effet ?

Nous, n’avions qu’à rappeler l’autorité qu’exercent sur l’art monumental les grands services publics d’architecture : nous en prenons