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avaient éteint leurs feux, et les glaciers des Alpes avaient reculé derrière le Rhône et le Jura, lorsque le nom de la Gaule, prit rang parmi les noms ethniques. Quant au climat, bien des hypothèses ont été émises qu’une étude scientifique des conditions climatologiques et de leurs symptômes réguliers ne confirme pas. Le plus souvent on inclina vers la supposition que notre climat s’était notablement refroidi depuis l’époque de la conquête. C’est le contraire qui serait plutôt vrai, bien que le changement en tout cas ait été très faible. La disparition d’un grand nombre de forêts y aurait surtout contribué. Le fait est, par exemple, que la culture de la vigne s’est avancée vers le nord dans des régions qui passaient pour complètement impropres à la végétation du précieux arbuste. Strabon affirmait positivement qu’on ne pouvait la cultiver au nord des Cévennes. Il est vrai que cette même culture a rétrogradé depuis quelques siècles en Normandie. Mais cela tient simplement à ce que, sauf dans quelques années exceptionnellement chaudes, on n’a jamais pu y faire que du vin détestable. Quand on eut appris à faire le cidre, — inconnu des Gaulois, dit M. Desjardins, ce qui nous paraît très improbable, — non plus en broyant indistinctement des fruits de toute sorte, comme on le fait encore dans quelques districts reculés de Savoie et d’Auvergne mais en choisissant les essences de pommiers les plus convenables à cette fabrication, le mauvais vin recula devant le bon cidre, et d’autant plus vite que les transports par mer fournirent de bonne heure au littoral de la Manche des vins du midi à des prix à peine supérieurs à ceux des pays de production. L’avance des vignes modernes sur les anciennes n’en est pas moins restée très considérable.

Les forêts, comme nous venons de le dire étaient beaucoup plus étendues qu’aujourd’hui. Les surfaces actuellement boisées devaient selon toute apparence l’être aussi du temps de la conquête, car on a énormément déboisé et très peu replanté. Le nord était, comme aujourd’hui, plus boisé que le midi, mais surtout parce qu’il était moins cultivé. De nos jours c’est uniquement parce qu’il est plus humide. La forêt des Ardennes attirait surtout l’attention par son immensité. Elle s’étendait pour ainsi dire sans interruption jusqu’à l’Escaut et se ramifiait avec les grands bois qui se succédaient du pays de Trêves à Besançon. Vers l’ouest elle avait, dans le Laonnais et le Parisis, des prolongemens dont les forêts actuelles de Senlis et de Compiègne ne sont que les débris. Ses dernières lisières approchaient Lutèce du côté du nord, et vers l’est la future capitale voyait se dessiner les grands bois des Meldi (Meaux), dont les forêts de Sénart et de Fontainebleau sont aujourd’hui les restes. Au sud et à l’ouest étaient celles des Sénones (Sens) et des Carnutes (Chartres). C’est dans leurs sombres profondeurs que s’ourdit la