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sait plus que jamais de souscrire à l’exclusion des cardinaux. Orner Talon prononça, au nom de la députation, un long discours qu’il nous a conservé dans ses Mémoires. Anne d’Autriche se montra encore plus réservée dans sa réponse qu’elle ne l’avait été avec le clergé ; elle se borna à dire qu’elle en délibérerait en son conseil. Malgré cela, l’assemblée du clergé s’inquiéta de cette solennelle démarche. Poussée par le coadjuteur, intéressé plus qu’un autre à ce qu’on ne fermât pas l’entrée du conseil du roi à ceux qui portaient un chapeau qu’il se flattait d’obtenir, elle décida dès le lendemain, lu mars, qu’elle ferait opposition au sceau contre la déclaration. L’opposition fut signifiée quelques jours après ; elle était signée du président de l’assemblée , George d’Aubusson , et de son secrétaire l’abbé Tubeuf. « Cette opposition , écrit Omer Talon, offensa le parlement, parce qu’elle taxait la compagnie d’avoir fait chose contraire au service du roi et au bien de l’état, » Mais comme la cour n’avait pu avoir de réponse de la régente , elle remit à en délibérer jusqu’à ce que cette réponse fût obtenue. Anne d’Autriche cherchait à gagner du temps ; elle répondit aux demandes nouvelles que lui adressait le parlement qu’elle n’en avait pas encore pu délibérer avec son conseil. Elle donnait d’autre part des espérances au clergé, approuvant devant ses députés l’opposition faite au sceau, parce que, disait-elle, il était naturel qu’il défendit ses intérêts. Les choses tirèrent ainsi en longueur jusqu’au mois d’avril, et quand Anne d’Autriche n’eut plus à redouter l’opposition de la noblesse dont l’assemblée venait de se dissoudre et jugea le parlement moins puissant, elle se tira des sollicitations de celui-ci par une promesse ambiguë. Elle assura la cour de justice qu’elle donnerait la déclaration avec l’exclusion demandée, mais elle ajouta qu’il la fallait tenir secrète pour ne pas se brouiller avec Rome et ne pas entraver la liberté du roi une fois qu’il aurait atteint sa majorité. Le parlement dut se contenter de ce mauvais billet.

Ainsi l’accord entre le parlement et le clergé n’avait pas duré longtemps, et celui-ci n’avait fait que se rapprocher davantage de la noblesse, dont l’aréopage parisien contrariait les visées. Le parlement en effet, à la première nouvelle de l’assemblée des gentilshommes aux Gordeliers, avait traité cette réunion comme une sorte de conciliabule et n’en avait nullement favorisé les projets. La noblesse chercha alors un appui dans le clergé. Elle envoya une seconde députation à l’assemblée ecclésiastique, députation qui avait à sa tète, comme l’autre, le comte de Fiesque. Elle faisait appel à l’étroite union des deux premiers ordres de l’état, dont elle signalait la communauté d’intérêts, et engageait les députés du clergé à réclamer de concert avec les gentilshommes la convocation des états-gé-