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l’exposé des motifs de la proposition de 1879, paraît être de 15 à 20 millions par an, nous sommes convaincu que les pouvoirs exigeront une preuve certaine que les départemens qui sont appelés à en profiter sont réellement surtaxés. Cette justification leur paraîtra d’autant plus nécessaire, dans les circonstances actuelles, que l’impôt qu’on propose de diminuer n’est ni exorbitant, ni entaché d’inégalités excessives, et que le dégrèvement ne produirait aucun résultat économique appréciable.

Les dégrèvemens proposés nous paraissent également inacceptables au point de vue financier et économique.

D’une part, l’exonération sera insensible pour les contribuables des départemens en faveur desquels elle sera accordée ; elle n’aura aucune action sur les affaires. Ce sera donc pour le trésor un sacrifice sans compensation.

D’autre part, une nouvelle évaluation du revenu des propriétés rurales, bien qu’elle ne doive avoir pour résultat, en réalité, qu’un dégrèvement partiel, donnera lieu néanmoins inévitablement à une grande agitation parmi les populations des campagnes, qui voient toujours avec défiance des opérations de cette nature. Elles supposeront d’autant plus facilement que ce travail est fait en vue d’une augmentation ultérieure d’impôt, qu’on a formellement déclaré à la tribune de l’assemblée nationale, qu’une répartition plus proportionnelle du principal des contingens rendra toujours acceptable et facile la création de centimes additionnels généraux quand les exigences budgétaires la réclameront. Cette opération, qui ne satisfera réellement personne, inquiétera tout le monde.

Ajoutons que la réduction du principal de la contribution foncière apportera le trouble dans les budgets départementaux et communaux. Il est évident, en effet, que les centimes additionnels, qui sont suffisans avec les contingens actuels, devront être augmentés dans les départemens où la mesure proposée aura diminué le principal de l’impôt.

Enfin, en admettant que notre situation budgétaire permette qu’on fasse un sacrifice au profit de la propriété foncière, il y a mieux à faire que de dégrever les contingens de quelques départemens. Il faut plutôt faciliter la transmission des propriétés immobilières au profit de ceux qui peuvent en tirer le meilleur parti. Actuellement la propriété foncière est immobilisée par l’énormité des droits de mutation. Les frais de vente, y compris les honoraires des officiers ministériels et les droits de quittance, s’élèvent à 10 pour 100 de la valeur de la chose vendue, c’est-à-dire qu’on ne peut aliéner aujourd’hui en France qu’à la condition de perdre le dixième du capital. C’est là certainement la cause principale de la