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L’auteur a voulu exalter Rome, siège de la puissance pontificale et source du pouvoir impérial, centre à un double titre de tout le monde chrétien. C’était là toute une poésie politique très conforme aux idées des derniers temps du moyen âge, mais qui allait s’évanouir pendant le XVIe siècle.

Ne pourrait-on pas conjecturer que la même idée a présidé à l’orientation bizarre de ces deux derniers plans ? Celui qui les a dressés suppose l’observateur placé au sommet du Quirinal et perpendiculairement au fleuve. Le Tibre entre pour lui en ville vers la droite et coule vers la gauche. Ainsi se trouve ménagée à l’horizon, en toute liberté, la vue du Vatican et du Janicule. La pensée d’attirer d’abord les regards vers la basilique de Saint-Pierre et le palais des papes n’aurait-elle pas dicté cette disposition, comme au moyen âge les géographes prenaient volontiers Jérusalem pour centre du monde ? — Le château Saint-Ange paraît tout d’abord, sur la rive droite. La forme en est à peu près semblable à celle que donnent soit une intéressante toile de Carpaccio à l’Académie des beaux-arts de Venise, soit la grande fresque de la Bataille de Constantin, au Vatican ; tel est probablement l’aspect qu’offrait ce monument à la fin du XVe siècle. Il a trois étages, sans aucune trace extérieure des statues qui devaient l’orner jadis. — Les plans de M. de Rossi et le tableau de Venise donnent la statue de l’Ange rappelant la célèbre vision de Grégoire le Grand ; nous savons d’ailleurs qu’il y avait au temps d’Alexandre VI (on ne dit pas depuis combien d’années) une pareille statue ; une explosion la détruisit en 1497 ; elle fut remplacée sous Paul III par un marbre, puis, sous Benoît XIV, par le bronze actuel.

La représentation de la basilique de Saint-Pierre, telle que la donne le plan conservé à Mantoue, est particulièrement intéressante. On y voit à la façade, vers la droite du spectateur, une tribune élégante soutenue par des colonnes : c’est la célèbre loge dite de la bénédiction, un petit chef-d’œuvre de sculpture renaissance, dont M. Müntz a donné aussi, d’après un dessin inédit de Grimaldi, une curieuse reproduction. À gauche de l’église, deux absides rappellent cette antique chapelle des sépultures impériales, annexe de l’ancienne basilique, dans laquelle on a trouvé de précieux objets. Tout à côté se trouve la célèbre guglia, ou aiguille, c’est-à-dire l’obélisque dressé par Caligula sur la spina du cirque de Néron ; les débris accumulés par les siècles autour de sa base l’avaient conservé debout : c’est celui que Sixte-Quint fera transporter en 1586 au milieu de la place Saint-Pierre. Le moyen âge croyait que la boule dont il était surmonté contenait les cendres de César.

Le Tibre est traversé, selon nos deux plans, par quatre lignes de ponts dans l’enceinte de la ville. À l’entrée du pont Saint-Ange, sur