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au-delà des frontières de son empire ; pour achever leur première campagne, les puissances alliées n’avaient plus qu’à chasser les Français des pays allemands situés entre la Pleisse et le Rhin.


II. MARCHE DES ALLIES EN FRANCE. — CONGRES DE CHÂTILLON.

L’esprit révolutionnaire qui, en 1807, s’était caché sous le manteau du patriotisme prussien, et qui, plus tard, avait arboré les couleurs teutoniques, fut introduit en 1812 et en 1813 dans les conseils de l’empereur de Russie par le baron de Stein, le général Gneisenau et d’autres transfuges prussiens et allemands. On n’a qu’à lire attentivement quelques-unes des proclamations lancées par le tzar pendant la campagne de 1812 pour ne garder aucun doute à cet égard. Le même esprit présida aux négociations qui eurent lieu entre la Russie et la Prusse à Kalisch. Toutefois l’intérêt direct des deux puissances ne fut pas négligé. Elles promirent de s’assister mutuellement dans la conquête du duché de Varsovie pour la Russie, et du royaume de Saxe pour la Prusse. Les arrangemens conclus sous ce rapport entre les deux souverains les mirent plus tard dans une fausse position, quand il s’agit de poursuivre la grande œuvre de la restauration politique de l’Europe, et ils furent la source de grandes et nombreuses difficultés entre ces deux cours et l’Autriche.

Dès l’année 1812, après la retraite de Napoléon, l’empereur Alexandre.. avait jeté les yeux sur le baron de Stein pour en faire l’arbitre futur des destinées de l’Allemagne. Celui-ci joua un rôle considérable dans les affaires de Kalisch, et son influence ne cessa de se faire sentir jusqu’à la deuxième paix de Paris en 1815. Pourtant ce n’est qu’à Leipzig que le tzar mit pour la première fois le baron de Stein en face du cabinet autrichien.

Le lendemain de l’entrée des alliés dans cette ville (19 octobre), l’empereur Alexandre me fit appeler pour me faire part de la nécessité de mettre le baron de Stein à la tête de l’administration des pays allemands reconquis et, à reconquérir, administration dont il fallait s’occuper aux termes de la convention arrêtée à Teplitz, relativement à la situation provisoire de ces conquêtes. Comme je connaissais de longue date les travers d’esprit du baron de Stein, j’opposai à ce choix une vive résistance. L’empereur François appuya personnellement mes efforts. Ils restèrent infructueux. Le tzar finit par m’avouer qu’il avait fait des promesses formelles au baron de Stein, et qu’il lui faudrait absolument les tenir sous peine d’être