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conseil de guerre se sépara, mais le parti prussien se montrait fort peu satisfait.

Je n’ai pas le dessein d’entrer dans le détail des opérations militaires ; je me bornerai donc à enregistrer ici ce qui a trait à la partie politique. La bataille que le prince de Schwarzenberg était décidé à accepter près d’Arcis se réduisit à un simple combat d’avant-postes ; Napoléon fit cesser l’engagement dès qu’il se fut convaincu que les armées autrichienne et russe réunies consentiraient à entrer sérieusement en lutte. A son grand étonnement, le général en chef vit, des hauteurs situées derrière Arcis, que l’armée française battait en retraite et se dirigeait vers l’est.

L’empereur d’Autriche était resté à Bar-sur-Aube ; il ne comptait quitter cette ville pour Arcis que si la bataille s’engageait. Tous les ministres, à l’exception du comte de Nesselrode, étaient auprès de sa majesté.

Dans l’intervalle, un aide de camp du prince de Schwarzenberg, le comte de Paar, arriva au quartier-général de l’empereur. Il venait faire part à sa majesté des nouvelles dispositions prises par le général en chef. Après avoir passé sur la rive droite de l’Aube, ayant acquis la certitude que Napoléon continuait son mouvement vers l’est, le prince de Schwarzenberg proposa au tzar et au roi de Prusse de marcher sur Paris avec toutes les forces des alliés ; mais, par suite de ce mouvement, l’armée autrichienne et une partie de l’armée russe couraient le risque d’être coupées de leurs lignes d’opération. Napoléon pouvait avoir deux plans : ou bien se porter sur nos derrières et attaquer la queue de l’armée qui venait par Nancy ; ou bien se jeter dans les places fortes de l’est, et, renforcé par leurs garnisons, entreprendre une nouvelle guerre en se plaçant entre le Rhin et les armées d’invasion.

Le feld-maréchal prévenait l’empereur qu’en cas de succès il s’emparerait de Paris et s’y établirait solidement, et qu’en cas d’échec il se retirerait sur la Belgique. Il priait en même temps sa majesté d’avertir la ligne d’étapes militaires des dangers qui la menaçaient. Le comte de Paar apportait aussi à l’intendant-général de l’armée russe, resté à Bar-sur-Aube, l’ordre de rejoindre immédiatement le quartier-général du tzar. Le premier mouvement de l’empereur fut de courir sur l’heure au quartier-général. Le simple calcul des distances lui montra que ce n’était pas à tenter. Lors de l’arrivée de l’aide de camp comte de Paar, l’armée s’était déjà avancée vers Paris d’une journée de marche ; ce n’est donc qu’à la troisième étape que l’empereur aurait pu rejoindre le quartier-général. Or le pays à traverser était ouvert aux coureurs français. Sa majesté dut, à son grand regret, se résigner à attendre les événemens. Je