Page:Revue des Deux Mondes - 1879 - tome 36.djvu/779

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

s’étant porté pour la première fois exactement au sud de la Nouvelle-Zélande, rencontra par le 51e degré de latitude le petit archipel des îles Auckland[1]. Il y revint l’année suivante et déclara prendre possession au nom de la couronne d’Angleterre. Le marin, songeant à l’avenir, laissa sur le rivage de l’île principale des bêtes porcines, qui se sont très vite multipliées. En 1811, un baleinier, s’étant avancé plus qu’il n’était habituel vers la grande banquise, rencontra l’île Macquarie ; ce fut un coup de fortune, on égorgea quatre-vingt mille phoques ou otaries. Un capitaine reconnut que la partie australe de la Nouvelle-Zélande est une île, — de son nom, on l’appellera l’île Stewart ; on apprit qu’un canal, le détroit de Foveaux, la sépare de Te-Wahi-Pounamou. On sut que la terre de Banks n’est pas isolée, comme le supposait Cook ; un isthme sablonneux la relie à la grande terre[2], — c’est une péninsule.

Les voyages à la Nouvelle-Zélande étaient devenus fréquens ; on n’imaginait plus qu’un navire bien armé, pourvu d’un équipage assez nombreux, dût courir de grands risques au contact des insulaires, lorsque un événement épouvantable vint renouveler toutes les impressions de terreur du temps passé. L’émotion publique se trouva d’autant plus vive que les circonstances de la catastrophe demeuraient ignorées. Un vaisseau, du port d’environ 500 tonneaux, le Boyd, commandé par le capitaine James Thompson, avait été expédié par le gouvernement britannique pour transporter des convicts à Botany-Bay. En 1809, il mettait à la voile pour le retour. Partant de Port-Jackson avec des passagers, il allait toucher à la Nouvelle-Zélande dans le dessein de prendre un chargement de bois de construction. Soudain arrive dans la colonie anglaise de la mer du Sud cette sinistre nouvelle que rien n’explique : tout l’équipage, tous les passagers embarqués sur le Boyd ont été massacrés, le bâtiment a été la proie des flammes. Plusieurs années s’écoulent, et personne ne peut révéler les motifs du conflit et du désastre. On n’aura d’informations précises que le jour où les membres de la mission évangélique entendront le récit du chef de Wangaroa, le fauteur du massacre.

L’insulaire avait résidé dans la colonie de la Nouvelle-Galles, où les Anglais l’avaient baptisé du nom de George. On le dépeint comme un homme d’un physique patibulaire, ayant contracté dans ses rapports avec les matelots des façons d’une familiarité choquante et une sorte d’impudence qui contrastaient avec la tenue habituelle de ses compatriotes. Il avait navigué sur des bâtimens anglais et se louait des officiers. Se trouvant à Port-Jackson avec un

  1. Nommé aussi Lord Auckland’s Grove.
  2. Te-Wahi-Pounamou. — Cos importantes corrections faites à la carte dressée par Cook vinrent en grande partie d’une exploration du navire anglais Pegasus.