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Des mémoires excellens pour la réforme de l’église furent présentés par des évêques de France. Rien de plus sombre que la requête de Guillaume Duranti, évêque de Mende, second de ce nom. La cour de Rome y est présentée comme un mauvais lieu. L’incontinence y était si commune que Duranti est amené à proposer de permettre le mariage aux ecclésiastiques dans la mesure où cela se pratique dans l’église grecque. Les profits que la cour tirait des maisons de prostitution, établies près des églises, à la porte même du palais papal, étaient un scandale plus grand encore. Mais le pape opposait à toute réforme les moyens dilatoires dont il avait le secret. Tout l’hiver se passa en conférences et en pourparlers assez stériles. On discuta sans fin sur les exemptions ; aucune résolution efficace ne fut prise. Les inoffensives erreurs de Pierre-Jean d’Olive, les pieuses rêveries quiétistes des bégards et des béguines, le vieil esprit de l’Évangile éternel, vivant encore en Frà Dolcino et Gérard Ségarelle, furent les monstres que l’on écrasa. Tâche plus difficile ! on voulut mettre la paix entre les partis acharnés l’un contre l’autre qui divisaient les franciscains. Clément fit une constitution pour établir que les frères mineurs, par leur profession, ne sont pas plus tenus que tous les autres chrétiens à l’observation de tout l’Évangile. Le schisme continua néanmoins plus violent que jamais ; les deux partis se poursuivaient, se dépossédaient comme des ennemis.

Une série de mesures sagement conçues pour mettre fin à quelques-uns des abus les plus crians du clergé, surtout des réguliers, n’eut pas, ce semble, beaucoup d’efficacité. Le régime des hôpitaux fut cependant amélioré. On donna à ces établissemens des espèces de tuteurs ou curateurs, qui furent l’origine des administrations laïques, « à la honte du clergé, dit le sage Fleury ; car, dans les premiers siècles, on ne croyait pas les pouvoir mettre en meilleure main que des prêtres et des diacres. »

Le pape avait toujours annoncé que l’œuvre de la conquête de terre-sainte serait un des objets principaux du concile. On parla beaucoup, en effet, de « passage général ; » les rois de France, d’Angleterre et de Navarre s’y engagèrent par vœux ; une foule de seigneurs les imitèrent, sans que personne prît cette promesse au sérieux. Il n’y eut de sérieux que les mesures fiscales arrêtées en vue d’une expédition qui ne devait pas avoir lieu. Pour les frais de la guerre sainte, le concile ordonna la levée d’une décime pendant six ans, en défendant néanmoins de faire la levée avec trop de rigueur, de saisir, par exemple, les calices, les livres et les ornemens des églises.

Une excellente décision fut prise, mais, comme tant d’autres projets des papes du XIIIe siècle relatifs à la même matière, resta sans conséquence. L’étude des langues orientales était une condition