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leur doit accorder. Les météorites sont en effet de précieux témoins qui nous révèlent la constitution des corps célestes et qui par comparaison éclairent d’un jour nouveau l’histoire de la terre. Aussi s’applique-t-on maintenant à les recueillir avec un soin extrême, et grâce à M. Daubrée chacun peut étudier dans les galeries du Muséum d’histoire naturelle une série des plus remarquables par la beauté des échantillons et des plus complètes par la variété des types. Les circonstances qui accompagnent la chute des météorites changent peu dans leurs traits principaux. Le bolide, sorte de projectile lumineux, se meut avec une vitesse comparable à celle des astres, de 20 à 30 kilomètres à la seconde. Sa trajectoire, en général peu inclinée à l’horizon, mais d’une orientation très variable, demeure souvent brillante comme si le météore abandonnait derrière lui une poussière de feu, et elle peut être suivie parfois sur un long parcours, par exemple de Santander jusqu’aux environs de Montauban pour la météorite d’Orgueil. Lancé ainsi à travers l’atmosphère, le bolide comprime violemment l’air devant lui, s’échauffe jusqu’à l’incandescence et finalement se brise en éclats avec une formidable détonation dont le retentissement se fait entendre à plus de 100 kilomètres. Les débris alors tombent sur le sol, animés non plus de la vitesse planétaire qui les emportait, mais de l’accélération que la pesanteur leur imprime, et avec ce sifflement que les Chinois comparent au bruissement d’ailes des oies sauvages. Ils se répandent sur une aire d’une étendue variable, tantôt peu nombreux, tantôt très multipliés : on en comptait trois mille à Laigle sur un ovale de 12 kilomètres de long. Enfin leur poids, ordinairement peu considérable, atteint par exception 2, 3 ou 7 milliers de kilogrammes pour les fers météoriques du Brésil, et descend à quelques centigrammes pour les esquilles pierreuses semées sur la neige dans la chute de Hessle près d’Upsal.

L’arrivée des météorites ne paraît jusqu’ici soumise à aucune loi de récurrence, mais des échantillons identiques proviennent quelquefois de chutes singulièrement concordantes, témoin celles de Erxleben (15 avril 1812) et de Pillitsfer (15 avril 1863). Peut-être en outre sont-elles un peu plus abondantes le jour que la nuit. Elles n’affectent spécialement aucune zone terrestre, bien qu’elles soient nombreuses au Mexique, au Chili, aux États-Unis, et plus rares en Suisse que dans la France méridionale ou l’Inde anglaise. En étendant aux deux hémisphères les chiffres propres à l’Europe et en faisant la part de ce qui échappe à l’observation, on évalue à six ou sept cents le nombre annuel dus chutes sur la surface du globe. Facilement oxydables et promptes à se désagréger, les météorites venues pendant les âges géologiques n’ont jamais été