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par les fissures d’une obturation incomplète, par un robinet d’éprouvette, par la lumière d’un canon, ou par la tête mobile d’une culasse, corrodent les parois, creusent des sillons contournés et entraînent au dehors le bronze pulvérisé. Ces exemples divers expliquent comment les cupules, sortes de contre-empreintes des balles de gaz violemment développées, se manifestent en alignemens ou par groupes quand on fait éclater une pièce d’acier sous l’action de la dynamite. Elles naissent sans doute instantanément à la surface qu’elles chagrinent, et précèdent la déchirure du métal. En même temps les parois argileuses du puits où se fait l’explosion sont affouillées et comme mamelonnées en creux par le mouvement gyratoire des gaz. Enfin les fragmens présentent sur leurs bords élargis des écrasemens, des arrachemens et des bavures, comme s’ils avaient été laminés sous les étreintes d’un corps solide. Qu’on ne croie pas d’ailleurs que les particules sableuses contenues dans la dynamite jouent ici quelque rôle : la nitroglycérine ou le fulmicoton produisent des effets identiques. Sous d’énormes pressions, nous avions déjà vu les solides s’écouler à la manière des fluides : dans les expériences non moins surprenantes de M. Daubrée, des gaz, travaillant à l’air libre, mais sous une tension extrême, labourent presque instantanément les matériaux les plus résistans, comme le feraient à peine de puissans outils de fer ou d’acier.

L’analogie de ces résultats de l’expérimentation avec ce que nous apprend l’examen des météorites amène donc à concevoir un solide craquelé par la pression de l’air qu’il refoule en vertu de sa vitesse et dont il est incapable de soutenir l’effort. Séparés par une première détonation, les fragmens peuvent subir encore plusieurs ruptures successives, mais leur répartition ordonnée suivant leur poids sur le champ allongé de leur dispersion est un indice de leur commune origine. A en juger d’ailleurs par la température que nécessite la combustion du fer, la réaction de l’air comprimé n’est guère inférieure à la tension gazeuse dans les expériences précitées.

Nous n’avons envisagé jusqu’ici que les caractères extérieurs des météorites; mais au-delà de la mince pellicule que l’incandescence a fondue, la constitution minérale est restée ce qu’elle était dans les espaces cosmiques, et elle nous montre, au milieu d’élémens qui nous sont familiers, quelques associations spéciales. Les conditions de leur formation peuvent d’ailleurs être éclairées par des expériences synthétiques qui reproduisent les météorites, soit de toutes pièces, soit en partant des roches terrestres les plus analogues. On peut en effet incorporer au fer doux par la fusion quelque peu de silice et de nickel, ou oxyder partiellement le siliciure de fer associé