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« Ce 28 juin. — A dix heures du matin, on a transporté le corps du tsarévitch à l’église de la Trinité, où il a été exposé; le chancelier et deux évêques l’ont accompagné.

« Ce 29 juin. — Fête de Sa Majesté. On a lancé à l’amirauté le vaisseau nouvellement achevé, le Forestier, construit sur les plans de Sa Majesté; elle assistait à la cérémonie avec tous les ministres, et on s’y est fort diverti.

« Ce 30 juin. — Sa Majesté s’est rendue à l’église de la Trinité à sept heures du soir; on y a célébré le service de mort du tsarévitch A. P. avec l’assistance de tout le clergé... A neuf heures, on a processionnellement ramené le corps à la citadelle : Leurs Majestés le tsar et la tsarine Catherine, tous les ministres, sénateurs et officiers suivaient le corps, porté par vingt-quatre gentilshommes; ce même soir, on l’a enseveli dans la cathédrale, ensemble avec la feue princesse héritière, dans le parvis près de la porte d’entrée du fond à gauche. »

Ces renseignemens officiels se complètent par l’extrait d’un autre journal, celui du prince Menchikof, tenu par quelque secrétaire ou valet de chambre. Cette dernière relation nous montre le prince accompagnant le tsar à la citadelle, dans la matinée du 26, chez le tsarévitch Alexis, « à ce moment malade; » puis Menchikof est rentré dans sa demeure et n’est ressorti que pour joindre le souverain à l’église de la Trinité, vers le soir. — « La journée a été belle, ensoleillée, avec une légère brise. Ce même jour, le tsarévitch A. P. est passé de ce monde dans la vie éternelle. » — Le rédacteur de ces notes rend compte le lendemain du grand; dîner qui eut lieu pour l’anniversaire de Poltava et de la fête dans les jardins de sa majesté, u où l’on s’est beaucoup amusé. »

Weber, dans les mémoires déjà cités, ne s’écarte pas sensiblement de la version officielle. Il rapporte la visite du tsar à la forteresse le matin du 26, et mentionne la venue de plusieurs messagers qui annoncèrent l’agonie du tsarévitch. « A cinq heures du soir, un quatrième messager (c’était M. Ouchakof, major des gardes), vint dire au tsar que le prince son fils souhaitait avoir la consolation de le voir encore une fois... Dans le moment que Sa Majesté entrait dans sa chaloupe pour aller à la forteresse, il vint, un cinquième courrier qui lui apporta la nouvelle que le prince venait d’expirer. » — Weber confirme ce fait important consigné dans la note anonyme des archives, que tout le peuple fut admis à voir la dépouille du défunt et à baiser ses mains dans l’église de la Trinité.

Le résident hanovrien est seul à parler sur ce ton. Dès que nous passons des journaux de la cour et de la garnison aux rapports des ministres étrangers, les faits changent totalement d’aspect. Voici