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de nos professeurs, une licence ès-lettres, une licence en histoire et une licence en philosophie[1]. Outre l’agrégation ordinaire de philosophie, qui est du reste trop métaphysique et devrait faire une part à la science sociale, il est essentiel d’établir une agrégation particulière de philosophie morale et sociale ou, si l’on veut, de sciences morales et politiques. On ne manquera ni d’examinateurs ni de candidats pour cette agrégation, qui sera très recherchée[2]. Aux deux maîtres de conférences qui enseignaient la philosophie et l’histoire de la philosophie à l’Ecole normale supérieure, on en adjoindra un troisième chargé d’enseigner la science sociale, l’économie politique, le droit et la politique. — Ces études seront obligatoires pour les historiens et les littérateurs comme pour les philosophes. Tous les élèves suivront d’ailleurs avec empressement un cours qui offre un intérêt si manifeste. Une classe de philosophie sociale sera créée dans toutes les facultés[3]. Ce cours sera obligatoire pour tous les élèves de médecine et de droit, qui y viendront sans regret. Une chaire analogue sera fondée au Collège de France,

  1. Celle-ci comprendra, par exemple, pour l’examen écrit, une composition latine sur un sujet littéraire commun à tous les candidats, une composition française de philosophie également commune aux trois licences, une autre d’économie politique, une autre de droit civil ou constitutionnel; pour l’examen écrit, l’explication d’un philosophe grec, latin ou français, des interrogations sur l’histoire de la philosophie et sur les sciences sociales. La licence d’histoire, outre la composition littéraire et la composition philosophique, comprendra deux compositions d’histoire et des interrogations.
  2. Cette agrégation comprendra une composition écrite de philosophie, une autre d’économie politique, une autre de jurisprudence; les épreuves orales comprendraient des thèses sur des sujets de philosophie morale, d’esthétique, de sciences sociales, une explication de texte emprunté soit aux moralistes, soit aux jurisconsultes; une leçon sur la morale, une autre sur la science sociale ou l’économie politique, une autre sur le droit ou la politique. On voit les services que rendront des agrégés de cet ordre. Ils partageront avec les professeurs ordinaires de philosophie la tâche d’enseigner la philosophie morale ou les sciences sociales aux élèves des classes de lettres, à ceux des sciences et à ceux de l’enseignement spécial. En attendant les nouveaux licenciés ou agrégés, on répartira provisoirement entre les professeurs des diverses classes les matières du programme proposées plus haut, sans augmentation du nombre d’heures habituel. Les professeurs de lettres enseigneront dans leur classe l’esthétique et la logique élémentaire, au lieu d’un cours de littérature vague et abstrait; ils pourront également, par mesure provisoire, enseigner la morale élémentaire. En philosophie, l’économie politique et le droit seront enseignés par le même professeur qui aujourd’hui les enseigne au cours spécial. Le professeur est ordinairement quelque jeune avocat. Quand l’agrégation de philosophie sociale sera établie, on emploiera de préférence les agrégés nouveaux pour ces cours, qui auront un esprit philosophique. Au reste, les nouveaux licenciés en philosophie pourront rapidement venir en aide aux professeurs pour enseigner les matières du nouveau programme.
  3. Un cours de philosophie morale, d’économie sociale et de droit devrait également exister dans les écoles normales primaires ; car les instituteurs auront à enseigner la morale civique et les lois du pays, quand les projets relatifs à l’enseignement primaire auront été adoptés par les chambres.