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d’infériorité au moins dans le bassin de la Méditerranée. À ce premier avantage d’assurer un fret de sortie à nos navires, le charbon en joint un autre, celui de pouvoir procurer le plus souvent un fret de retour aux navires importateurs étrangers. Lorsque ces navires arrivent en effet à Marseille et à Cette chargés de marchandises lourdes ou encombrantes telles que du soufre, des douelles, des minerais, des grains qu’ils nous amènent de l’Adriatique, de la Méditerranée, de la Mer-Noire ou des États-Unis, ils sont obligés la plupart du temps de repartir sur lest. Si, au contraire, notre charbon se présentait à eux sur les quais de nos ports, il leur assurerait un fret de retour régulier ; et les expéditeurs de ces navires pourraient développer en toute sûreté leurs opérations sur la France, et auraient tout intérêt à prendre en retour, même à prix réduit, un chargement de houilles françaises.

Les transformations de l’industrie moderne dans ces dernières années permettraient d’ailleurs d’assurer un fret de retour tout spécial aux navires exportateurs de charbon. Ce fret est le minerai de fer. Le développement de nos industries métallurgiques est en effet lié à celui de nos houillères. Les établissemens de forges et de fonderies viennent tout naturellement se grouper à proximité des lieux de production du combustible minéral dont ils absorbent une si grande quantité. Mais le minerai convenable se trouve rarement à pied d’œuvre. La fabrication de l’acier fondu, qui tend de plus en plus à se substituer au fer pour le grand outillage de nos railways et les formidables engins de notre flotte, exige d’ailleurs aujourd’hui des minerais spéciaux d’une richesse bien supérieure à celle dont on s’était contenté jusqu’à présent.

Le département du Gard, en particulier, qui possède quinze hauts fourneaux, ne peut être alimenté par la production des minerais indigènes. Ces minerais sont assez pauvres, ne contiennent qu’une proportion de métal de 20 à 30 pour 100 et ne peuvent être utilisés que si on les mélange avec des minerais supérieurs ; car les lits de fusion des hauts fourneaux doivent présenter une teneur en fer de 35 à 45 pour 100 en moyenne. Il est donc nécessaire d’avoir recours à des minerais étrangers beaucoup plus riches ; et on va les chercher assez loin dans les Pyrénées, en Espagne, à l’île d’Elbe et surtout en Afrique, où les magnifiques gisemens de Mokta-el-Hadid, près de Bône, présentent près de 17 millions de tonnes d’affleurement, contenant 67 pour 100 environ de fer, admirablement disposés pour l’embarquement, à l’embouchure de la Seybouse, et pouvant alimenter largement tous les hauts fourneaux du littoral, de la vallée du Rhône et du centre de la France.

La question de transport, si importante pour le charbon, ne l’est pas moins pour le minerai ; et il est évident qu’un échange peut et