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obéissait à O’Connell, qui semblait n’avoir qu’un mot à dire pour que la guerre civile éclatât de nouveau. Il y avait alors dans cette lie un lord-lieutenant, lord Anglesey, qui n’était pas homme à se laisser intimider par une situation violente et dont l’attachement aux idées de suprématie protestante n’était pas douteux. Néanmoins lord Anglesey se disait partisan des concessions ; le plus pressé était, à son avis, de rendre aux catholiques l’égalité politique. Peel se laissa convaincre par la force des argumens qu’invoquait le premier magistrat de l’Irlande. On eût pu croire que Wellington offrirait plus de résistance ; il n’en fut rien. Ce vaillant soldat, malgré qu’il eût des convictions très fermes, se comportait partout comme un stratégiste sur le champ de bataille. Il savait envisager la position de l’ennemi sans illusion ni préjugé et céder à propos le terrain qu’il lui était impossible de défendre. Lui aussi acquit bientôt la conviction que lord Anglesey était dans le vrai. Un incident parut d’abord ajourner la solution qui se préparait. Une lettre de Wellington à l’archevêque de Dublin, colportée de main en main et mal comprise par ceux qui avaient intérêt à la mal interpréter, provoqua les critiques de lord Anglesey, qui dut se retirer. Son successeur, lord Northumberland, n’était connu que par sa grande fortune et par le luxe dont il aimait à s’entourer. Cependant la question, loin d’être enterrée, était près d’aboutir. À force d’obsessions, Wellington avait obtenu de George IV la permission de présenter un bill de réforme religieuse.

Ce fut un coup de théâtre lorsque le discours du trône, en février 1829, annonça cette grande nouvelle. On sut bientôt que Peel en était l’auteur responsable ; aussi les conservateurs n’hésitèrent-ils pas à le traiter en renégat. Peel, l’espoir du parti ! Peel, qui s’était séparé de Canning sur cette question de la suprématie protestante ! Peel, qui représentait l’université d’Oxford, la citadelle du torysme ! Il ne lui restait plus, disait-on, qu’à demander sa récompense à Rome. Le pape pouvait à bon droit ajouter une nouvelle fête à son calendrier et célébrer la conversion de saint Peel. Le secrétaire d’état de l’intérieur ne se croyait nullement traître à son pays pour s’être abandonné, sous ; l’empire des circonstances, à des tendances libérales ; mais il s’avouait que les électeurs qui l’avaient nommé pensaient peut-être)autrement. Il offrit donc au vice-chancelier d’Oxford de se démettre du mandat que les membres de l’université lui avaient conféré, puis il se représenta à leurs suffrages. Ceux qui vivaient mêlés aux événemens du jour apprécièrent ce que cette évolution avait de nécessaire et lui rendirent leurs suffrages ; mais les partisans de l’église étaient en nombre prépondérant. Peel n’eut que 609 voix tandis que son compétiteur en obtenait 775. Il n’était pas embarrassé du