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La natalité des Français a oscillé, en Algérie, entre 35 et 41 par 1,000 habitans, ce qui est un beau résultat, si l’on songe qu’en France elle ne dépasse guère 26 par 1,000 ; elle a été évidemment stimulée par le changement des conditions d’existence, qui se présentaient plus faciles et plus larges. La mortalité s’élève d’ordinaire en même temps que le nombre des naissances, parce qu’il meurt toujours beaucoup d’enfans ; néanmoins la mortalité des Français, qui était au début de 46 par 1,000 habitans, a bientôt diminué et n’était plus, en 1876, que de 25, à peine supérieure à la mortalité normale en France (23). Pour les Espagnols, on constate que la natalité, d’abord exceptionnellement forte (47.5), descend peu à peu à 40, puis à 38, tandis que la mortalité oscille autour de la moyenne qui s’observe en Espagne (30) ; on dirait qu’en se fixant en Algérie, ils ne changent pas de climat. Pour les Italiens et les Maltais, l’influence du changement de résidence n’est guère plus sensible, tandis que la race germanique paraît peu propre à s’acclimater en Algérie. La mortalité des Allemands a d’abord atteint le chiffre de 55, puis elle s’est abaissée à 33, mais en restant presque toujours supérieure à la natalité.

Pour mieux faire ressortir cette influence du milieu, nous empruntons à M. Ricoux le tableau suivant, où les moyennes des années 1872-1876, pour l’Algérie, ont été mises en regard des moyennes normales des pays d’origine :


Natalité « Mortalité «
Algérie Pays d’origine Algérie Pays d’origine
Français 37 26 28 23
Espagnols 40 38 30 30
Italiens 40 37 27 30
Maltais 40 33 27 24
Allemands 33 38 39 27

On voit que, sauf les Allemands, toutes les races se montrent en Algérie plus fécondes que dans leur mère-patrie ; l’accroissement est surtout manifeste pour les Français, peut-être parce que la natalité de la France est une des plus faibles de l’Europe. Quant à la mortalité, elle est, pour les Italiens, moindre en Algérie qu’en Italie ; pour les Espagnols, l’écart est nul ; pour les Français et les Maltais, la mortalité est un peu plus forte que dans les pays d’origine, ce qui s’explique à la rigueur par l’élévation de la natalité[1] ; mais pour les Allemands, l’aggravation saute aux yeux, et comme elle coïncide avec une natalité

  1. M. Vallin a d’ailleurs signalé ce fait significatif, que la mortalité de nos troupes d’Afrique, et même celle des troupes de France servant passagèrement en Afrique, est notablement inférieure à la mortalité des soldats indigènes.