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peu près passif, et Pfyffer écrivit dans son rapport qu’il n’avait pas perdu un seul homme ; la phalange empêcha sans doute les huguenots d’user des avantages qu’ils avaient obtenus au début et permit à la cavalerie royale de se reformer. L’ambassadeur de France dit aux cantons « que le régiment de la nation des ligues n’a rien oublié de sa générosité accoutumée, s’estant très vaillament présenté en bataille, si que les ennemys ne les auserent attaquer et ne sfest perdu ung seul homme des leurs. » Pfyffer écrivit : « Si le jour eût été plus long, nous en eussions fini avec eux. »

Les huguenots firent encore très bonne contenance le lendemain, mais ils levèrent le blocus de Paris. Le vieux connétable de Montmorency était mort à la bataille de Saint-Denis : en le tuant, écrivait Pfyffer dans son rapport, les huguenots « ont tué un ennemi qui leur était bon. » Le connétable avait, en effet, toujours cherché à s’interposer entre les deux partis ; allié aux Châtillon, il était l’ennemi de la maison de Lorraine. Catherine de Médicis fit nommer lieutenant-général du royaume le duc d’Anjou, le jour où il entrait dans sa quinzième année ; ce jeune prince devenait ainsi le commandant de l’armée royale, et le 19 décembre, le roi écrivait au colonel Pfyffer :

« Sieur colonel, vous scavez assez de longue main la fyance que j’ay en vous et ceux de vostre natyon, dont je ne pouvois faire plus ample ny meilleur tesmoynage qu’en vous baillant mon frère vous commander en mon armée. » Il lui explique ensuite qu’une « certaine entreprise doit se fere avec ung bon nombre de cavallerie, laissant derryere les Suisses, gens de pied francoys et l’artillerie, employez « ung autre effect ; » mais que le duc d’Anjou ne doit point se joindre à cette cavalerie et doit demeurer avec les Suisses.

Pendant la campagne qui suivit, l’armée royale fut pour ainsi dire énervée par les négociations de la reine, qui ne désespéra jamais de ramènera elle le prince de Condé ; mais celui-ci ne fit qu’amuser la reine mère et opéra sa jonction avec Jean-Casimir, qui lui amenait de grands renforts allemands. L’armée de Condé, très faible au début, s’éleva bientôt à trente mille hommes ; cette armée était toutefois fatiguée de la guerre, et les nobles huguenots auraient voulu en finir dans une bataille rangée qu’on leur refusait toujours.

Le régiment suisse s’était accru de 4,000 hommes qu’on avait trouvés à Vitry le 28 décembre 1567. Il resta dix jours immobile dans cette ville. On n’a ; aucun rapport suisse entre le commencement de l’année 1568 et le mois de mars ; la cavalerie huguenote tenait la campagne et arrêtait : tous les courriers. Le 5 mars, Pfyffer rapporte que l’armée royale était repartie pour Paris, où elle était rentrée le 19 février. Pendant cette marche d’hiver, le régiment avait eu beaucoup de malades et un grand nombre d’hommes avaientv