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barreau de Paris s’était mis en rapport avec les barreaux de province. Montlosier écrivait de Randanne (21 mars 1826) à son correspondant habituel :

« Ce n’est pas tant le grand succès qui m’occupe, encore que j’y sois peu accoutumé, que la sphère de ces succès. Je les désirerais surtout aux Tuileries. C’est là qu’est le bien, c’est là qu’est le mal. M. Billecoq pense que les avocats n’ont point à délibérer sur le Mémoire : tout en m’approuvant au fond, il blâme mon titre. M. Dupin, au contraire, me mande qu’il y a chez lui une réunion de quarante-cinq avocats, qu’on a posé diverses questions au nombre de cinq, pour lesquelles on a nommé autant de rapporteurs chargés de faire les recherches législatives destinées à éclairer la discussion. Il ajoute : « Les délibérations seront graves, profondes et, je l’espère, sans passion, avec un égal respect, un égal amour pour la religion, la patrie et le prince. Ces trois intérêts seront toujours présens à nos cœurs et à nos esprits. »

« Quand ces délibérations me parviendront, j’agirai en conséquence. Cependant, avant de faire aucune démarche, il importe, à ce que je crois, de produire et mon ouvrage et la consultation de MM. les avocats de Paris et des autres cours royales, et d’avoir ainsi une masse d’avis liés et motivés dans toutes les parties, sur toute la surface du royaume. Avec ces forces, il faudra voir de quelle manière on peut aborder soit les chambres, soit le gouvernement, soit les cours royales. Veuillez avoir un œil attentif sur ce qui se passe, voir, si vous pouvez, M. Dupin et M. Billecoq, en conférer avec vos amis, tels que MM. Molé et Pasquier, afin de faire ce qu’il faut et ne faire que ce qu’il faut. Ce n’est pas assez d’avoir un appui parmi les hommes de loi et les hommes d’état, M. Billecoq m’annonce dans sa lettre que j’en aurai dans le clergé, et plus là, dit-il, que parmi les hommes du monde. »

Et dans une autre lettre, datée du 4 avril de la même année, nous prenons quelques extraits dignes d’intérêt :

« Mon ouvrage faisant grande rumeur, on était à délibérer quel parti l’on prendrait lorsque l’écrit de l’abbé Lamennais est venu compliquer l’affaire. La première pensée a été de nous traduire ensemble en cour royale, après une saisie. C’est alors, dit-on, que le nonce du pape est intervenu. Prévoyant que l’affaire de son protégé était plus véreuse que la mienne, il a pressé, insisté, et enfin obtenu qu’on abandonnerait les poursuites contre l’abbé; il s’en est suivi qu’on a abandonné la mienne. Cependant, comme il est arrivé bientôt des adresses de divers prélats et que, d’un autre côté, les diverses chambres de la cour royale, émues par les assemblées des avocats, ont délibéré si elles ne poursuivraient pas d’office l’ouvrage de l’abbé; le ministère, excité par les évêques, qui, à leur