Page:Revue des Deux Mondes - 1881 - tome 45.djvu/472

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




14 mai 1881.

La vie publique pour un grand pays ne se résume certes pas uniquement dans des incidens éphémères, dans des polémiques plus éphémères encore, dans un congé que se donnent les chambres ou dans la rentrée d’un parlement après quelques semaines de vacances. C’est toujours une chose sérieuse sans doute que cette rentrée du parlement, surtout lorsqu’elle s’accomplit, comme aujourd’hui, dans un moment où s’agitent des questions qui intéressent vivement l’opinion, que des explications officielles peuvent seules préciser et éclaircir. Mais ce n’est pas tout. Les incidens passent, les polémiques les plus bruyantes n’ont qu’un instant, les parlemens eux-mêmes ne sont souvent qu’une sorte de représentation extérieure ; à travers les faits qui se succèdent et ces débats qui vont se rouvrir, il y a ce qu’on pourrait appeler la partie latente de la vie d’une nation. Il y a le travail des idées, le mouvement mystérieux des choses, les déclins ou les réveils d’opinion dans une société éprouvée, les causes secrètes de force ou de faiblesse ; il y a cette partie morale autant que politique, toujours faite pour attirer les esprits qui ne se contentent pas du spectacle banal des querelles de tous les jours ou des conflits du conseil municipal de Paris et de M. le préfet de police, qui se plaisent à scruter les événemens, à en ressaisir le sens et la logique, à se demander de temps à autre où en est un pays comme la France après toutes ses crises. C’est l’originalité et l’intérêt d’un livre qui a paru récemment sous ce titre : le Péril national, d’essayer de retracer la marche de nos affaires depuis quelques années. L’auteur, M. Raoul Frary, est un jeune écrivain qui est mêlé aux luttes quotidiennes de la presse, mais qui sait se dégager assez du tourbillon pour décrire en moraliste pénétrant et en patriote réfléchi la situation de la France telle qu’elle est avec ses faiblesses et