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de rallier. Que résulte-t-il en effet de ces singulières polémiques qui font un certain bruit depuis quelque temps ? C’est que, même avant l’ouverture de la campagne électorale, on ne s’entend plus ; le désarroi est un peu partout dans les camps conservateurs. Les impérialistes ne savent plus où trouver un empereur, et quelques-uns d’entre eux émigrent vers la république. Les monarchistes ont deux drapeaux et se font la guerre, une guerre ardente, sans espoir de se mettre d’accord sur une restauration toujours fuyants, toujours insaisissable. On ne dira certainement pas que les conservateurs ne mettent pas tout leur zèle à servir la république par leurs divisions, à la préserver des conséquences des fautes qu’elle a pu commettre, à lui préparer des sucées à peu près assurés et inévitables dans les élections prochaines. Voilà la moralité la plus claire de toutes des polémiques auxquelles on se livre avec une naïve et stérile ardeur depuis quelque temps, on se bat pour que la république triomphe mieux au prochain scrutin.

La république, si on avait quelque prévoyance, ne devrait réellement trouva dans ces confusions de ses adversaires qu’une raison de plus de se fixer, de rallier autant que possible les opinions désintéressées et modérées qui dominent après tout en France, d’être un gouvernement pour tous, non un gouvernement de représaille et d’exclusion. Le fera-t-on ? On a du moins toutes les occasions favorables, et dans le calme du pays, et dans ces vaines querelles des partis qui Se réduisent eux-mêmes à l’impuissance en se plaçant en dehors de toute réalité, qui rendent une fois de plus à la république le service de démontrer qu’ils ne peuvent pas la remplacer, — et dans le succès de cette campagne semi-militaire, semi-diplomatique de Tunis, qui arrive à son dénoûment.

A peine la session a-t-elle recommencé, en effet, tout s’est précipité. Dès le premier jour de la rentrée des chambres, le gouvernement faisait une déclaration qui, sans trop s’étendre sur la marche des opérations militaires, semblait avoir particulièrement pour objet de préciser les intentions, les limites, le caractère, le but politique de l’expédition qu’on s’est vu obligé d’entreprendre. Dès hier il a pu porter au sénat et à la chambre des députés la nouvelle d’un résultat plus positif, qui n’est peut-être pas encore la fin des affaires tunisiennes, qui ressemble du moins au commencement de la fin, qui est un premier gage de paix conquis sans combat devant Tunis même. Tandis que les diverses colonnes du corps expéditionnaire continuaient leurs mouvemens combinés, les unes abordant les massifs montueux des Khroumirs, les autres suivant la vallée de la Medjerda, d’autres encore partant de la côte, de Tabarka et de Bizerte, le chef d’une de ces colonnes, le général Bréart, se portait rapidement vers Tunis et à paru presque à l’improviste devant le Bardo, aux portes de la résidence du bey. Le