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entre les mains du comité d’instruction publique, du comité de salut public, de la commission des six et de la commission des neuf. La nouvelle organisation des services allait en faire un département spécial, administré par une commission dont les trois premiers membres furent : Payan, commissaire, Fourcade et Julien, adjoints.

Le décret du 48 prairial an II. — Au même ordre d’idées que le décret sur les livres élémentaires se rattache une loi du 18 prairial an II, également rendue sur le rapport de Grégoire : « Le comité d’instruction publique présentera un rapport sur les moyens d’exécution pour une nouvelle grammaire et un vocabulaire nouveau de la langue française. Il présentera des vues sur les changemens qui en facilitent l’étude et lui donnent le caractère qui convient à la langue de la liberté. »

Après avoir révolutionné les institutions et les habitudes, il fallait bien révolutionner la langue. L’entreprise était hardie ; mais pourquoi ne l’eût-on pas tentée ? on avait déjà tant improvisé de choses !

Le bon Grégoire ne doutait pas du succès et voyait déjà, grâce à sa nouvelle grammaire, tous les patois supprimés[1] et « l’unité d’idiome » enfin établie dans la république.

L’exécution malheureusement ne répondit pas à son attente. Les Vaugelas du comité d’instruction publique se récusèrent, et la ci-devant langue française fut épargnée.

L’École normale. — Le personnel des petites écoles était déjà, sous l’ancien régime, fort insuffisant et l’on a vu que la pensée d’en assurer le recrutement d’une façon régulière, au moyen d’écoles spéciales, s’était produite à plusieurs reprises dans les dernières années de la monarchie. En 1794, la situation de ce personnel était bien plus mauvaise encore : l’émigration, la terreur, la guerre, l’incertitude du lendemain surtout, y avaient fait des vides énormes. La disette de sujets capables, — c’est le mot qui revient à chaque instant dans la correspondance des administrations départementales

  1. Il eût été plus simple d’envoyer, comme le voulait Barère, « des instituteurs de langue française dans chaque commune rurale des départemens du Morbihan, du Finistère, des Côtes-du-Nord et de la Loire-Inférieure. » L’organe habituel du comité de salut public à la convention avait présenté à ce sujet un projet qui fut voté, mais ne reçut jamais d’exécution. On a souvent cité ses paroles dans cette circonstance, a Vous avez décrété l’envoi des lois à toutes les communes de la république ; mais ce bienfait est perdu pour celles des départemens que j’ai indiqués. Les lumières portées à grands frais, aux extrémités de la France, s’y éteignent en arrivant, puisque les lois n’y sont pas entendues.

    « Le fédéralisme et la superstition parlent bas-breton, l’émigration et la haine de la république parlent allemand ; la contre-révolution parle italien, et le fanatisme parle basque. Brisons ces instrumens de dommage et d’erreur. »