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dépôts siliceux de formation récente que les géologues rattachent aux terrains d’alluvion. Alors, en effet, réapparaissent quelques plantes de la silice. On voit combien des examens de cette sorte présentent de pièges et réclament d’application. Une autre difficulté qui se répète à Fontainebleau presque à chaque instant, c’est que le grès y renferme un ciment calcaire, à tel point que le carbonate de chaux en cristallisant, a parfois imposé sa forme géométrique aux molécules de grès, qu’elle enferme dans des solides connus des minéralogistes sous le nom un peu barbare de « chaux carbonatée rhomboédrique inverse quartzifère de Fontainebleau. » Quand on touche avec une baguette de verre trempée dans l’acide nitrique un de ces fragmens en apparence gréseux, le gaz carbonique que renferme le ciment calcaire, dégagé de sa combinaison par l’acide, s’échappe en bouillonnant sous l’œil de l’observateur, en un mot, comme disent les chimistes, « fait effervescence. » Cette effervescence prouve d’une façon irréfragable la présence du calcaire, et il suffit au botaniste d’emporter dans un compartiment de sa vaste boite un petit flacon d’acide pour constater sur le lieu même la nature minéralogique du sol. Quand on prend cette précaution, on voit bientôt s’évanouir une à une les objections échafaudées par Thurmann et ses partisans contre la théorie de l’influence chimique. Ainsi comprise, chaque excursion dans un pays à sol varié apporte son contingent de preuves à l’appui de cette théorie. Dans une des excursions que la société a faites, en dehors de la forêt proprement dite, aux environs d’Arbonne, du lieu dit La Cambuse au lieu dit La Maison du père Poteau, on a marché pendant 2 kilomètres sur le sable pur, caractérisé par la flore même de la silice, quand sont apparues quelques plantes du calcaire (Kœleria cristata), en même temps que parmi le sable on découvrait quelques nodules de cette substance détachés du mamelon qui s’arrondissait au bout et à droite du sentier et qui, entièrement calcaire, a présenté des plantes telles que le Teucrium montamum sur le premier contrefort du massif de La Charme. Il était impossible de constater plus nettement l’influence qu’exerce la nature du sol sur celle de la végétation qui le recouvre.

La valeur de semblables constatations locales, quelque importante qu’elle soit, ne doit pas sans doute être exagérée. Nous reconnaissons volontiers qu’elles ne portent pas plus loin que le point où elles ont été prises. Quand elles se multiplient, comme dans la session de Fontainebleau, elles acquièrent une importance plus grande et affectent l’ensemble d’une région naturelle, dont elles aident à caractériser la végétation. Cela n’empêche pas que des constatations différentes ne puissent être faites dans des pays et sous des climats différens. De bons observateurs affirment que les plantes qui, dans