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certaines des conditions qu’imposait au constructeur tout programme d’architecture civile. On s’attend peut-être à nous voir décrire ici, au même titre, un monument plus célèbre, ce fameux Labyrinthe, dont parlent avec tant d’admiration tous les voyageurs grecs, Hérodote, Diodore et Strabon[1], mais nous ne sommes même pas sûrs qu’il faille reconnaître les restes du Labyrinthe dans les ruines qui ont été découvertes et décrites par Jomard et Caristie, puis, plus tard, étudiées à nouveau par Lepsius, ruines qui se trouvent à 7 kilomètres vers l’est-sud-est de Medinet-el-Fayoum, sur le versant oriental de la chaîne Libyque, en un point où l’on peut bien placer les bords du lac Mœris, tel que permettent de le reconstituer les recherches de Linant-Pacha. Mariette n’admettait pas que ce fussent là les débris du vaste édifice qui comptait parmi les sept merveilles du monde. « Je sais, nous disait-il un jour, où est le Labyrinthe ; il est caché sous les moissons du Fayoum, et je le ferai sortir de terre, si Dieu me prête vie. »

Quoi qu’il en soit, les ruines présentent un tel aspect de confusion, que tous les voyageurs qui visitent ce site renommé éprouvent une véritable déception, a Si l’on escalade, dit Ebers, la pyramide en briques d’un gris poudreux, mais jadis revêtue en plaques de granit luisantes, qui se dressait, au dire de Strabon, à l’extrémité du Labyrinthe, et si l’on contemple les ruines qui s’étendent à ses pieds, on constate que l’immense palais, dans lequel les chefs des nomes de l’Égypte se rassemblaient à certaines époques autour du roi, avait la forme d’un fer à cheval ; mais c’est tout ce qu’on distingue, car le milieu et l’aile gauche de l’édifice sont entièrement détruits, et, à droite, le pêle-mêle de chambres et de salles écroulées où plonge le soleil, et que les gens d’El-Haouâra prennent pour le bazar abandonné d’une ville disparue, se compose de misérables briques grises en limon desséché. Seuls, les murs de quelques chambres en pierre dure et quelques fragmens de grandes colonnes subsistent avec leurs inscriptions ; elles nous ont appris que ces constructions dataient d’Anemenha III, de la douzième dynastie[2]. »

Si Lepsius a retrouvé le véritable emplacement du Labyrinthe, le plan qu’il donne des bâtimens dont il a relevé les traces ne cadre guère avec la description de Strabon et avec ce que les anciens nous apprennent de la magnificence de l’édifice et de la grande dimension de ses matériaux. Quant au texte du géographe grec, il ne nous donne ni mesures de hauteur ni mesures de longueur ;

  1. Hérodote, II, 148 ; Diodore, i, 61 ; Strabon, XVII, 37.
  2. Ebers, l’Égypte, du Caire à Philœ, p. 174.