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types devient dès lors un enseignement aussi précieux, aussi sûr à consulter que s’il s’agissait de ceux que donnerait un thermomètre de précision. Les lois de l’analogie sont ici trop exactes pour entraîner dans des erreurs véritables, ou du moins l’erreur, si elle existe, se trouve ramenée dans des limites tellement étroites qu’on se trouve autorisé à ne pas en tenir compte.

Si nous remontions très loin dans le passé du globe, la flore du temps des houilles nous fournirait une première base. Les végétaux de cette époque reculée ont été l’objet des études de deux savans français, MM. Grand’Eury et B. Renault. L’un et l’autre s’accordent à reconnaître les allures désordonnées, les pousses continues prolongées jusqu’à l’épuisement de la tige, l’absence même de tout indice d’un accroissement régulier ou périodique chez les plantes qui caractérisent le mieux la flore carbonifère. Ainsi, non-seulement la chaleur humide de ce premier âge était extrême, mais elle n’aurait été, selon toute apparence, limitée par aucun intervalle à retour régulier, comparable à ceux qui constituent nos saisons. — Le point de départ serait donc une absence d’alternatives de repos et d’activité pour les plus anciens végétaux. Plus tard, ces alternatives se seraient prononcées, mais à l’aide d’une marche progressive. Le point d’arrivée, celui vers lequel notre globe aurait gravité, en s’en rapprochant toujours plus, consisterait au contraire dans l’établissement de deux saisons très tranchées, l’une de froid rigoureux imposant aux plantes un repos a])solu, l’autre de réveil et d’activité, réduite à quelques mois d’été. C’est effectivement ce qui se passe dans une partie de l’hémisphère boréal, surtout dans l’Asie intérieure et aux approches même du cercle polaire ; mais c’est ce qui n’a pas toujours eu lieu. Le globe a mis un temps très long à acquérir des saisons de plus en plus marquées : il fera probablement encore des progrès dans le sens de cette différenciation : c’est le secret de l’avenir. Après le temps des houilles, les troncs de conifères, avec leurs anneaux d’accroissement concentriques, régulièrement disposés, attestent l’apparition des saisons, mais sans doute encore assez peu distinctes. Ce qui le prouve, c’est que les cycadées et les fougères arborescentes qui peuplaient alors l’Europe s’étendaient sans obstacle jusqu’au-delà du cercle polaire, fréquentant les parages du Spitzberg et du Groënland. Cette circonstance démontre à elle seule que l’hiver, s’il en était un, était nul ou presque nul originairement, puisque en effet pour peu qu’il eût été marqué au centre de l’Europe par un abaissement relatif, cet abaissement aurait été nécessairement plus accentué à l’intérieur du cercle polaire, ce qui eût entraîné sans faute des divergences climatériques, dont les flores contemporaines des diverses parties de l’hémisphère