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de notre examen, nous touchons avec la seconde à la fin des temps quaternaires. Les glaciers se retirent de plus en plus, le renne lui-même reprend les sentiers du nord. Poursuivi par l’homme, auquel il prêtait une proie facile, il a été sans doute exterminé par lui dans le centre de l’Europe, tandis que le chamois et le bouquetin lui échappaient, en se réfugiant sur le sommet des montagnes. La chaîne qui part des âges anciens se relie alors peu à peu, non pas directement avec l’histoire, mais avec les temps préhistoriques les plus reculés. On sort réellement de la géologie pour pénétrer dans l’archéologie ethnique qui mène, à travers les âges successifs de la pierre polie, du bronze et du fer, vers une époque plus rapprochée de celle où nous plaçons nos premiers ancêtres et le berceau des civilisations primitives de l’Orient.

Pour achever l’esquisse et en combiner tous les traits épars, il faudrait prendre pour guide le marquis de Nadaillac et assister avec lui aux débuts des diverses populations du, globe. En Amérique, comme en Europe, en Égypte et dans le nord de l’Afrique, aussi bien que dans les Indes, on verrait toujours l’homme commencer par tailler la pierre, substance qu’il a sous la main et qui n’exige d’autre apprêt que la percussion. Les inventions et en première ligne celle de l’usage des métaux viennent ensuite, et la civilisation inaugure son cycle, soit pour le parcourir en entier, soit pour s’arrêter à mi-chemin. Mais un fait domine tous les autres, quand l’homme a été assez intelligent pour s’armer et se procurer des instrument, quand il a choisi dans ce dessein et façonné le caillou, il avait déjà le feu et par conséquent il avait pu modifier son alimentation, d’abord exclusivement végétale. C’est là le progrès le plus décisif, le premier de tous ; c’est alors que l’homme est allé devant lui et qu’il s’est répandu, n’importe dans quelle direction, sur toute la surface du globe.

Remarquons-le pourtant, en réalisant cette diffusion, en sortant de l’obscurité et de l’isolement pour s’étendre jusqu’aux extrémités des deux hémisphères, l’homme n’a fait que suivre l’exemple des animaux qui l’avaient précédé. Le cheval et l’éléphant, pour ne citer que ces deux types, s’étaient comportés de la même façon que l’homme. Eux aussi, longtemps inconnus, sortirent d’une région mère, lorsque les circonstances leur devinrent favorables. Ils s’avancèrent de proche en proche, venant l’un et l’autre de l’Asie où, selon M. Gaudry, on rencontre de vrais chevaux et de véritables éléphans dès la fin du miocène. Le cheval provient originairement sans doute d’une transformation de l’hipparion; il se montre d’abord dans le nord de l’Inde, puis il passe en Europe. C’est alors l’equus stenonis qui remplace et exclut l’hipparion sur le sol de notre