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Les deux frères s’embrassèrent, et la réconciliation parut complète. Catherine préparait alors une nouvelle expédition pour les Açores. Une démonstration sur la frontière des Flandres entrait dans ses projets. Grâce à son intervention, Henri III ayant promis à son frère des hommes et de l’argent, le duc se hâta de rentrer à Château-Thierry pour activer les préparatifs de sa nouvelle campagne. Ses forces le trahirent, une fièvre violente mit ses jours en danger. Catherine accourut. Ayant enfin compris qu’il n’y avait rien à espérer du côté des infantes, elle y avait à jamais renoncé, mais pour prêter l’oreille à une nouvelle intrigue de Taxis. Il s’agissait, de concert avec les Guise, de délivrer Marie Stuart et de la marier au duc d’Anjou, projet chimérique dont la vie de l’infortunée captive était l’enjeu. Dès que son fils fut un peu mieux, Catherine lui en parla. Tout en faisant semblant d’y consentir, le duc ne ralentit en rien ses préparatifs ; mais presque au lendemain du départ de sa mère, la fièvre le reprit, accompagnée de graves accidens. D’abondantes saignées le remirent une dernière fois sur pied. Il eut alors comme un retour de fortune ; toutes les conditions soumises en son nom aux

; états par des Pruneaux, son chargé d’affaires, avaient été acceptées. Le 2 juin, il annonça hautement qu’il allait prendre le commandement de l’armée. « Le cœur y est, mais le corps ne pourra 

suivre, » écrivait Noël de Caron, l’envoyé des états. Il disait vrai ; les jours du duc étaient comptés ; le 11 juin, il expirait à une heure de l’après-midi. Sentant sa fin approcher, il avait dicté son testament. Le nom d’Elisabeth n’y est pas une seule fois prononcé ; nous n’y avons relevé que ces mots amers à l’adresse des Flamands : « Ils m’ont fait payer bien cher leur titre de comte et de duc. » Chose étrange ! les habits de deuil qu’Élisabeth porta le jour des funérailles de ce prétendant si tardivement dédaigné lui avaient été envoyés par Catherine de Médicis.


HECTOR DE LA FERRIERE.